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Derniers essais de littérature et d'esthétique: août 1887-1890

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Poètes australiens


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Pall Mall Gazette

, 14 décembre 1888.



M. Sladen dédie son Anthologie, (nous devrions peut-être dire son herbier) de poésies australiennes à M. Edmond Gosse «dont l'exquise faculté critique, nous dit-il, est aussi remarquable dans ses poésies que dans ses conférences sur la poésie.»



Après un compliment aussi gracieux, M. Gosse aura certainement pour devoir de faire une série de conférences sur l'art aux antipodes devant les étudiants de Cambridge, qui seront certainement enchantés d'entendre parler de Gordon, de Kendall, de Domett, pour ne rien dire de l'extraordinaire assemblage de médiocrités que M. Sladen a tirées assez étourdîment de leur obscurité aussi modeste que méritée.



Toutefois Gordon est fort mal représenté dans le livre de M. Sladen, les trois spécimens de son œuvre, qui ont été insérés, se composant d'un fragment non revu, de son

Poème d'adieux

, et de l'

Adieu d'un Exilé

.



Ce dernier est touchant, cela s'entend, mais après tout, le banal touche toujours, et il est très fâcheux que M. Sladen n'ait pu conclure un arrangement financier avec les possesseurs des droits d'auteur de Gordon.



Il en résulte un dommage irréparable pour le volume que nous avons sous les yeux.



C'est grâce à Gordon que l'Australie a trouvé sa première expression en vers.



Néanmoins il y a ici quelques autres poètes qui méritent d'être étudiés, et on apprend avec intérêt des détails sur les poètes qui reposent sous l'ombre du gommier, cueillent les fleurs du roseau, et le buddawong, et la salsepareille, pour celles qu'ils aiment, et errent parmi les bosquets du mont Bawbaw en écoutant les incultes extases du mopoke.



Pour eux, novembre, c'est





La merveille aux ailes d'or

qui met une main dans celle de l'Été, l'autre dans celle du Printemps.



Janvier est plein de «souffles de myrrhe, et de subtiles suggestions du pays des roses».





C'est le chaud, le vivant mois de l'éclat, c'est lui

qui réjouit la terre et berce la forte et mélancolique mer.



tandis que Février, c'est la «Vraie Déméter»,





et éclaboussé du talon au genou du riche et chaud sang de la vigne

il arrive tout radieux à travers les bois jaunissants.



Chaque mois, à mesure qu'il arrive, reçoit des éloges nouveaux et fait naître une musique toute différente de la nôtre. Juillet est «une dame, née dans le vent et la pluie». En Août,





à travers la montagne, à travers toutes les landes noircies par le feu,

le vigoureux hiver souffle son adieu sauvage dans son cor.



Octobre est «la reine de toute l'année» «la dame à la blonde chevelure» qui s'en va, «les pieds entravés de fleurs» à travers «les collines aux contours hautains» et amène avec elle le Printemps.



Il faut décidément nous habituer au mopoke et à la salsepareille, faire en sorte d'aimer le gommier et le buddawong, autant que nous aimons les oliviers et les narcisses du blanc Colonus.



Après tout, les Muses sont grandes voyageuses, et le même pied, qui foula les crocus de Cumnor, effleurera quelque jour peut-être l'or, qui tombe des fleurs du jonc, et marchera délicatement sur l'herbe de la brousse à la teinte de tan.



M. Sladen a naturellement grande foi dans les perspectives qui s'ouvrent à la poésie australienne.



Il y a en Australie, nous dit-il, beaucoup plus d'auteurs capables de produire des œuvres de valeur qu'on ne l'a supposé.



Il est tout naturel que cela soit, ajoute-t-il. Car l'Australie possède un de ces climats délicieux qui engagent au repos en plein air.



Le milieu de la journée est si chaud qu'il est vraiment plus hygiénique de flâner que de se livrer à un travail plus énergique.



Soit, la flânerie en plein air n'est point une mauvaise école pour les poètes, mais cela dépend beaucoup du flâneur.



Ce qui frappe quand on lit le recueil de M. Sladen, c'est le caractère lamentablement provincial de la tendance et de l'exécution chez presque tous les auteurs.



Les pages succèdent aux pages, sans que nous trouvions autre chose que des échos sans mélodie, des reflets sans beauté, des vers pour magazines de second ordre, et des vers de troisième ordre pour journaux coloniaux.



Il semble que Poë ait exercé quelque influence – du moins il y a plusieurs parodies de sa manière; – un ou deux auteurs ont lu M. Swinburne, mais l'ensemble nous présente la Nature sans art sous sa forme la plus irritante.



Naturellement l'Australie est jeune, et même plus jeune que l'Amérique, dont la jeunesse est actuellement une de ses traditions les plus anciennes et les plus sacrées, mais le défaut absolu d'originalité dans l'exécution est curieux.



Et peut-être pas si curieux que cela, après tout. L'adolescence est rarement originale.



Il y a toutefois quelques exceptions.



Henry Clarence Kendall a un vrai don poétique.



La série de poésies sur les mois australiens, où nous avons déjà pris des citations, abonde en beautés.



Rose Aylmer

, par Landor est un classique en son genre; mais

Rose Lorraine

, de Kendall, a des passages qui ne sont pas indignes d'être mentionnés après lui, et la pièce intitulée:

Plus loin que Kerguélen

 est d'une mélodie admirable, par le rythme merveilleux des mots et une véritable richesse d'expression.



Il y a certains vers d'une puissance étrange, et vraiment, en dépit de l'exagération dans l'allitération, peut-être par suite de cela même, toute la pièce est une remarquable œuvre d'art.





Bien loin vers le Sud, vers l'espace où ne paraît pas une voile.

Loin de la zone de la fleur et de l'arbre,

s'étend, enveloppé d'hiver et de tourbillon et de plainte,

le fantôme d'une terre, entouré du fantôme d'une mer.

Mystérieux est le brouillard de son sommet à sa base;

le soleil de son ciel est ridé et gris.

C'est le fantôme de la lumière que la lumière qui éclaire sa face.

Jamais ce n'est la nuit, jamais ce n'est le jour.

C'est là le nuage ou il n'y a ni une fleur ni un oiseau;

ou l'on n'entend jamais la douce litanie des sources,

rien que l'orgueilleux, l'âpre tonnerre ne s'y perçoit.

Rien que la tempête, avec un grondement dans ses ailes.





Jadis à l'aurore de cette belle sphère,

sur cette terre à la face douloureuse, désolée

rayonna le jour bleu, et régna la beauté de l'année,

qui nourrit la feuille et la grâce de la fleur.

Grandioses étaient les lumières de son midi au cœur de l'Été.

Des Matins de majesté brillaient sur ses mers.

On y voyait la scintillation des étoiles et la splendeur de la lune,

qu'accompagnait la marche de la brise chantante.

Vallons et collines, ou murmuraient des ailes,

ravins pleins d'asphodèles, – espaces emperlés,

fleurissaient, flamboyaient de la splendeur du Printemps

au temps lointain, à l'aube de ce monde merveilleux.



M. Sladen présente Alfred Domett comme «l'auteur d'un des plus grands poèmes d'un siècle où ont fleuri Shelley et Keats, Byron et Scott, Wordsworth et Tennyson», mais les extraits qu'il donne de

Ranolf et Amohia

 ne justifient guère cette assertion, quoique le chant du Dieu de l'Arbre, au quatrième chant, soit d'une facture adroite, mais exaspérante.



Un

midi du cœur de l'Été

 par Charles Harpur, «le père grisonnant de la poésie australienne», est joli et gracieux.



Les

Accents forestiers

 par Thomas Henry, et la

Nuit du Samedi

 par Miss Veel, méritent d'être lus, mais en somme les poètes australiens sont extrêmement ternes et prosaïques.



On dirait qu'il y a peu de sirènes dans le Nouveau-Monde.



Quant à M. Sladen lui-même, il a fait son travail d'une manière très consciencieuse. Il va même jusqu'à refaire presque entièrement une pièce, par la raison que la copie manuscrite lui en est arrivée fort mutilée.





C'est un pays charmant que le pays des rêves

Au-delà de l'air lumineux

Il a des jours

plus ensoleillés

, des ruisseaux

plus scintillants

Et des jardins

plus beaux que ceux de la Terre

.



Telle est la première strophe de cette élucubration, et M. Sladen nous apprend avec un orgueil bien excusable que les endroits imprimés en italique sont de sa façon.



Voilà certainement un comble de la part d'un éditeur, et nous ne pouvons nous empêcher de dire que cela fait plus d'honneur à la bonté d'âme de M. Sladen qu'à son talent de critique et de poète.



De plus la publication, dans un volume de poésies «produites en Australie» de passages pris dans

l'Orion

 de Horne, ne saurait se justifier, d'autant plus qu'on ne nous donne aucun spécimen de la poésie que Horne écrivit pendant le temps qu'il passa réellement en Australie, où il remplissait l'emploi de «Gardien des Montagnes Bleues», emploi qui, du moins par sa dénomination, est bien le plus charmant qu'on ait jamais donné à un poète, et qui aurait admirablement convenu à Wordsworth, je veux dire le Wordsworth des bons moments, car il lui arrivait souvent d'écrire comme un

Distributeur de timbres

.



Néanmoins M. Sladen a fait preuve d'une grande énergie dans la compilation de cet épais volume, qui ne contient pas beaucoup de choses d'une réelle valeur, mais qui offre un certain intérêt historique, surtout aux personnes qui auront souci d'étudier les conditions de la vie intellectuelle dans les colonies d'un grand Empire.

 



Les notices biographiques de l'énorme cohue de versificateurs que contient ce volume, sont en grande partie dues à la plume de M. Patchett Martin.



Il en est de fort insuffisantes.



«Jadis habitant l'Australie Occidentale, résidant actuellement à Boston, États-Unis, a publié plusieurs volumes de poésie» voilà qui est plaisamment concis quand il s'agit d'un homme tel que John Boyle O'Reilly.



De même dans ce qui suit: «poète, essayiste, critique et journaliste, une des figures les plus marquantes du Londres littéraire», bien peu de gens reconnaîtront l'industrieux M. William Sharp.



Néanmoins, et tout bien considéré, nous devons être reconnaissants envers un volume qui nous a donné des spécimens de l'œuvre de Kendall, et peut-être un jour M. Sladen composera-t-il une anthologie de poésie australienne, au lieu d'un herbier de vers.



Son livre actuel a beaucoup de bonnes qualités, mais il est presque illisible.




Les Modèles à Londres


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English Illustrated Magazine

, janvier 1889.



Les modèles professionnels sont une invention purement moderne.



Chez les Grecs, par exemple, ils étaient tout à fait inconnus.



M. Mahaffy, il est vrai, nous apprend que Périclès avait coutume d'offrir des paons aux grandes dames de la société athénienne pour les décider à poser devant son ami Phidias, et nous savons que Polygnote introduisit dans son tableau des Femmes Troyennes le portrait d'Elpinice, sœur du grand leader conservateur de l'époque, mais il est évident que ces grandes dames ne rentrent pas dans notre sujet.



Quant aux vieux maîtres, il est certain qu'ils firent sans cesse des études d'après leurs élèves et leurs apprentis, que même leurs tableaux religieux abondent en portraits de leurs connaissances, et de leurs parents, mais ils semblent n'avoir point eu l'inestimable avantage de l'existence d'une classe de gens qui ont pour unique profession de poser.



En fait, le modèle, au sens propre du mot, est le produit direct des écoles académiques.



De nos jours, chaque pays, excepté l'Amérique, a ses modèles.



A New-York, et même à Boston, un bon modèle est une telle rareté que la plupart des artistes sont réduits à peindre des Niagara et des millionnaires. Mais en Europe il en est autrement.



Là nous avons des modèles en grand nombre, et de toute nationalité.



Les modèles italiens sont les meilleurs.



La grâce naturelle de leurs attitudes, ainsi que le merveilleux pittoresque de leur teint, fait d'eux des sujets faciles, – peut-être trop faciles, – pour la brosse du peintre.



Les modèles français, quoiqu'ils ne soient pas aussi beaux que les modèles italiens, possèdent une vivacité de sympathie intellectuelle, un don de comprendre l'artiste, qui est tout à fait remarquable.



Ils ont aussi un grand empire sur les variétés de l'expression faciale. Ils sont particulièrement dramatiques et savent jacasser l'

argot d'atelier

 avec autant d'aisance que le critique du

Gil-Blas

.



Les modèles anglais forment une classe complètement à part.



Ils n'ont point le pittoresque des Italiens. Ils n'ont point la vivacité d'intelligence des Français. Ils sont absolument dépourvus de tradition de leur ordre, pour ainsi dire.



De temps à autre, un antique vétéran frappe à la porte d'un atelier et propose de poser pour Ajax défiant la foudre, ou pour le Roi Lear sur la lande flétrie.



Il y a quelque temps, l'un d'eux se rendit chez un peintre fort connu qui, se trouvant pour le moment, avoir besoin de ses services, l'engagea, et, pour commencer, lui dit de s'agenouiller dans l'attitude de la prière.



– Serai-je biblique ou shakespearien? demanda le vétéran.



– Va pour shakespearien, répondit l'artiste, en se demandant par quelle subtile

nuance

 d'expression le modèle allait exprimer la différence.



– Très bien, monsieur, dit le professeur de pose.



Puis il s'agenouilla solennellement, et se mit à cligner de l'œil gauche.



Toutefois cette catégorie est en train de disparaître.



Règle générale, de nos jours, le modèle est une jolie fille, d'un âge allant de douze à vingt-cinq ans, qui n'entend rien à l'art, ce qui lui est égal, et qui ne se préoccupe que de gagner sept ou huit shellings par jour sans trop de peine.



Les modèles anglais regardent rarement un tableau et jamais ne se risquent en des théories esthétiques.



En somme, elles réalisent entièrement la conception idéale que se fait M. Whistler d'un critique d'art, car elles ne formulent aucune espèce de critique.



Elles acceptent toutes les écoles d'art avec l'absolue impartialité d'un commissaire-priseur et posent devant un jeune et fantasque impressionniste avec autant de docilité que devant un érudit et laborieux académicien.



Elles ne sont ni pour ni contre les Whistléristes.



La querelle entre l'école des faits et l'école des effets les laisse indifférents.



Les mots d'idéaliste et de naturaliste arrivent à leurs oreilles sans y apporter aucune signification.



Elles désirent seulement que l'atelier soit bien chauffé, que le lunch soit chaud, car tous nos charmants artistes paient le lunch à leurs modèles.



Quant à ce qu'on leur demande de poser, elles ont la même indifférence.



Le lundi, elles endossent les haillons de la jeune pauvresse pour M. Pumper, dont les touchants tableaux de la vie moderne tirent tant de larmes au public, et le mardi elles posent en péplum pour M. Phœbus, qui est convaincu que tous les sujets vraiment artistiques sont nécessairement antérieurs à l'ère chrétienne.



Elles s'en vont gaîment, tête baissée, à travers tous les siècles, à travers tous les costumes, et comme les acteurs, elles ne sont intéressantes que quand elles ne sont pas elles-mêmes.



Elles ont tout à fait bon cœur. Elles sont très accommodantes.



– Que posez-vous? dit un jeune artiste à

une

 modèle qui lui avait envoyé sa carte.



Tous les modèles, disons-le en passant, ont des cartes et un petit sac noir.



– Oh! Tout ce que voudrez, monsieur, dit la jeune personne. Le paysage, s'il le faut.



Il faut convenir qu'au point de vue intellectuel, elles sont des Philistins, mais physiquement elles sont parfaites, – du moins quelques-unes, le sont.



Bien qu'aucune d'elles ne sache parler grec, il y en a beaucoup qui peuvent prendre l'air grec, ce qui, naturellement est d'une grande importance pour un peintre du dix-neuvième siècle.



Leurs remarques se bornent aux

banalités

 qui ont cours au pays de Bohême.



Cependant, quoiqu'elles soient incapables d'apprécier l'artiste, en tant qu'artiste, elles sont toutes disposées à apprécier l'artiste en tant qu'homme.



Elles sont très sensibles aux bons procédés, au respect et à la générosité.



Un modèle, d'une grande beauté, qui avait posé pendant deux ans pour un de nos peintres anglais les plus distingués, était fort montée contre un marchand ambulant de glaces à un penny.



Le jour où elle se maria, le peintre lui envoya un joli cadeau de noces et reçut en retour une belle lettre de remercîments avec ce post-scriptum remarquable:



«N'achetez jamais les glaces vertes».



Quand elles sont fatiguées, l'artiste avisé leur accorde du repos.



Alors elles prennent une chaise et lisent des horreurs à un penny jusqu'à ce que, lasses de la tragédie en littérature, elles reprennent leur place dans la tragédie artistique.



Quelques-unes fument des cigarettes.



Toutefois les autres modèles regardent cela comme une preuve de manque de sérieux, et généralement on ne l'approuve pas.



Elles sont engagées à la journée et à la demi-journée.



Le tarif est un shelling par heure, auquel de grands artistes ajoutent les frais d'omnibus.



Les deux meilleures qualités en

elles

 sont leur extrême joliesse et leur extrême respectabilité.



Considérées en bloc, elles ont une conduite excellente, surtout celles qui posent pour la figure, fait curieux ou naturel, suivant l'idée qu'on se fait de la nature humaine.



Généralement elles font de bons mariages. Parfois elles épousent l'artiste.



Il est aussi terrible pour un artiste d'épouser son modèle que pour un

gourmet

 d'épouser sa cuisinière: le premier n'obtient plus de poses, le second n'a plus à dîner.



En somme, les modèles féminins anglais sont des êtres très naïfs, très naturels, très accommodants.



Les vertus, que l'artiste apprécie le plus en elles, sont la joliesse et l'exactitude.



En conséquence, un modèle raisonnable tient note par écrit de ses engagements et s'habille proprement.



Naturellement la morte-saison, c'est l'été, où les artistes quittent la capitale. Mais depuis quelques années, certains artistes ont décidé leurs modèles à les suivre et la femme d'un de nos peintres les plus charmants a souvent à la campagne la charge d'hospitaliser trois ou quatre modèles, de telle sorte que le travail de son mari et des amis de celui-ci ne soit point interrompu.



En France, les modèles émigrent en masse dans les villages qui ont un petit port sur la côte, ou dans les hameaux forestiers où les peintres se groupent.



Mais, règle générale, les modèles anglais attendent patiemment à Londres le retour des artistes.



Presque toutes vivent chez leurs parents et aident à faire marcher le ménage.



Elles ont tout ce qu'il faut pour être immortalisées dans l'art, excepté la beauté des mains.



Les mains du modèle anglais sont presque toujours grossières et rouges.



Quant aux modèles masculins, c'est d'abord le vétéran dont il a déjà été fait mention.



Il a toutes les traditions du grand style, et il est en train de disparaître aussi rapidement que l'école qu'il représente.



Un vieux qui parle de Fuseli, est, naturellement, insupportable, et de plus les patriarches ont cessé d'être des sujets à la mode.



Passons au véritable modèle d'académie.



C'est généralement un homme de trente ans, qui a rarement une bonne figure, mais qui est une vraie merveille de musculature.



En fait, c'est l'apothéose de l'anatomie, et il a si bien conscience de sa splendeur qu'il vous entretient de son tibia ou de son thorax comme si personne au monde n'avait le pareil.



Puis, voici les modèles orientaux.



Leur nombre est restreint, mais il y en a constamment une douzaine dans Londres.



Ils sont très recherchés, car ils peuvent rester immobiles pendant des heures, et généralement ils possèdent de charmants costumes.



Néanmoins, ils ont en très médiocre estime l'art anglais qu'ils regardent comme un compromis entre une personnalité vulgaire et une banale photographie.



Ensuite vient le jeune Italien, qui a passé la Manche tout exprès pour être modèle, ou qui le devient quand son orgue de barbarie est en réparation.



Souvent il est tout à fait charmant avec ses grands yeux mélancoliques, sa chevelure frisée, et son corps svelte et brun.



Il mange de l'ail, il est vrai, mais enfin debout, il sait se tenir comme un fauve, et couché, comme un léopard.



Aussi lui pardonne-t-on son ail.



Il est toujours pleins de jolis compliments, et il passe pour avoir adressé de bonnes paroles d'encouragement, même à nos plus grands artistes.



Quant au jeune Anglais du même âge, il ne pose pas du tout.



Apparemment il ne regarde pas la carrière de modèle comme une profession sérieuse.



En tout cas, il est malaisé, sinon impossible, de mettre la main sur lui.



Les petits Anglais sont aussi difficiles à avoir.



Parfois un ex-modèle qui a un fils, lui frisera les cheveux, lui lavera la figure, et le promènera d'un atelier à l'autre, bien savonné, bien reluisant.



La jeune école ne le goûte guère, mais l'école plus ancienne l'accepte, et quand il apparaît sur les murs de l'Académie Royal, on l'appelle l'

Enfance de Samuel

.



De temps à autre aussi, un artiste happe dans le ruisseau une paire de

gamins

 et leur demande de venir dans son atelier.



La première fois, ils viennent toujours, mais ensuite, ils ne paraissent plus au rendez-vous.



Ils n'aiment pas à poser dans l'immobilité, et ils ont une forte, mais peut-être naturelle, aversion à prendre des airs pathétiques.



En outre, ils sont sous l'impression constante que l'artiste se moque d'eux. C'est un fait fâcheux, mais un fait certain que les pauvres gens sont complètement inconscient de leur qualité de pittoresque.

 



Ceux d'entre eux qu'on décide, non sans peine, à poser, le font avec l'idée que l'artiste n'est pas autre chose qu'un philanthrope bienveillant, qui a fait choix d'un moyen excentrique pour distribuer des aumônes aux gens qui ne le méritent pas.



Peut-être le Bureau des Écoles de Beaux Arts apprendra-t-il au gamin de Londres sa valeur artistique, et alors il sera un modèle meilleur qu'il ne l'est maintenant.



Le modèle de l'Académie jouit d'un privilège remarquable, le droit d'extorquer un shelling à tout associé ou membre de l'Académie Royale nouvellement élu.



Ces modèles attendent à Burlington House que l'élection soit annoncée, et alors ils se dirigent au pas de course vers la demeure de l'artiste.



Celui qui arrive le premier reçoit l'argent.



Dans ces derniers temps, ils ont eu beaucoup de mal à cause des longues distances qu'ils ont dû franchir à la course, et ils apprennent avec mécontentement l'élection d'artistes qui habitent à Hampstead ou à Bedford-Park, car ils se font un point d'honneur de ne point recourir au chemin de fer souterrain, aux omnibus, ou aux autres moyens artificiels de locomotion.



Le prix de la course est au plus rapide.



Outre les poseurs de profession, de l'atelier, il y a les poseurs du Row, les gens qui posent aux thés de l'après-midi, ceux qui posent en politique, et les poseurs des cirques.



Toutes ces quatre catégories sont charmantes, mais la dernière seule est vraiment décorative, toujours.



Les acrobates et les gymnastes peuvent donner au jeune peintre une infinité d'idées, car ils mettent dans leur art un élément de vitesse dans le mouvement, de changement incessant qui, de toute nécessité, fait défaut au modèle d'atelier.



Ce qu'il y a d'intéressant en ces «esclaves de l'Arène», c'est qu'en eux la Beauté est un résultat inconscient, et non un but cherché, qu'elle résulte, en fait, d'un calcul mathématique de courbes et de distances, d'une justesse absolue de l'œil, de la connaissance scientifique de l'équilibre des forces, et d'un entraînement physique parfait.



Un bon acrobate a toujours de la grâce, bien que la grâce ne soit point son but.



Il a de la grâce parce qu'il fait ce qu'il doit faire de la meilleure manière dont la chose puisse se faire.



Il a de la grâce parce qu'il est naturel.



Si un ancien Grec revenait de nos jours à la vie, ce qui serait une rude épreuve pour nos prétentions, à cause de la sévérité de ses critiques, on le trouverait bien plus souvent au cirque qu'au théâtre.



Un bon cirque est une oasis d'Hellénisme dans un monde qui lit trop pour être sage et pense trop pour être beau.



Sans le terrain de course à pied d'Eton, sans la piste à remorquage d'Oxford, sans les écoles de natation de la Tamise, et les cirques annuels, l'humanité oublierait la perfection plastique et dégénérerait en professeurs myopes et

précieuses

 à lunettes.



Ce n'est pas que les propriétaires de cirques, en général, aient conscience de leur haute mission.



Est-ce qu'ils ne nous assomment pas avec la haute école et ne nous ennuient pas avec leurs clowns à la Shakespeare?



Mais enfin, ils nous présentent des acrobates, et l'acrobate est un artiste.



Le seul fait qu'il n'adresse jamais la parole au public montre combien il est convaincu de cette grande vérité que le but de l'art n'est point de faire paraître la personnalité, mais de plaire.



Le clown peut être braillard, mais l'acrobate est toujours beau.



Il est une combinaison intéressante de l'essence de la sculpture grecque avec le bariolage du costumier moderne.



Il a même eu son compartiment dans les romans de notre siècle et si dans

Manette Salomon

, le modèle est démasqué, les

Frères Zemganno

 sont l'apothéose de l'acrobate.



En ce qui concerne l'influence du modèle ordinaire sur notre école anglaise de peinture, on ne saurait dire qu'elle soit absolument bonne.



Certes, c'est un avantage pour un jeune artiste enfermé dans son atelier, que de pouvoir isoler «un petit coin de vie», comme disent les Français, d'avec les alentours qui le gâtent et d'être en mesure de l'étudier dans certaines conditions de lumière et d'ombre.



Mais cet isolement même conduit souvent le peintre au

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