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Derniers essais de littérature et d'esthétique: août 1887-1890

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Une des Bibles du Monde 41

Le Kalévala est un de ces poèmes que M. William Morris appela un jour les «Bibles du Monde.»

Il se range comme épopée nationale, à côté des poèmes homériques, des Niebelungen, du Shahnameth, et du Mahabharata.

L'admirable traduction que vient d'en publier M. John Martin Crawford sera certainement bien accueillie de tous les lettrés, de tous les amis de la poésie primitive.

M. Crawford, dans sa très intéressante préface, revendique pour les Finlandais le mérite d'avoir commencé, avant toute autre nation européenne, à recueillir et conserver leur antique folklore.

Au dix-septième siècle, nous rencontrons des hommes au goût littéraire tels que Palmsköld, qui travaillèrent à rassembler et interpréter les différents chants des habitants des landes marécageuses du Nord.

Mais le Kalévala proprement dit fut réuni par deux grands érudits finlandais de notre siècle même: Zacharias Topélius et Elias Lönnrot.

Tous deux étaient des médecins praticiens, et leur profession les mettait en contact fréquent avec les gens du peuple.

Topélius, qui réunit quatre-vingts fragments épiques du Kalévala, passa les onze dernières années de sa vie au lit, où le retenait une maladie incurable. Mais ce malheur ne refroidit point son enthousiasme.

M. Crawford nous apprend qu'il avait coutume de grouper les colporteurs finlandais auprès de son lit et de les inviter à chanter leurs poésies épiques, qu'il transcrivait à mesure qu'elles étaient récitées, et quand il entendait parler d'un ménestrel finlandais réputé, il faisait tout son possible pour faire venir chez lui le chanteur et recueillir de lui de nouveaux fragments de l'épopée nationale.

Lönnrot parcourut tout le pays à cheval, en traîneau attelé de rennes, en canot, recueillant vieux poèmes et chants chez les chasseurs, les pêcheurs, les bergers.

Chacun lui donnait son concours, et il eut la bonne fortune de trouver un vieux paysan, un des plus vieux parmi les runolainen de la province russe de Wuokinlem, qui surpassait de beaucoup tous les autres chanteurs du pays, et il obtint de lui l'une des rimes les plus splendides du poème.

Et certainement, le Kalévala, tel que nous le possédons, est un des grands poèmes du monde.

Il ne serait peut-être pas tout à fait exact de le présenter comme une épopée.

Il lui manque l'unité centrale du vrai poème épique dans le sens que nous donnons à ce mot.

On y trouve bien des héros, outre Wainamoinen.

C'est à proprement parler un recueil de chants populaires et de ballades.

Son antiquité ne donne aucune prise au doute: il est païen d'un bout à l'autre, même la légende de la vierge Mariatta, à qui le soleil indique l'endroit «où est caché son bébé d'or», est nettement antérieure au christianisme, selon tous les savants.

 
Là-bas est ton enfant d'or,
Là repose endormi ton saint enfant,
caché jusqu'à la ceinture dans l'eau,
caché dans les joncs et les roseaux,
 

Les Dieux sont surtout des dieux de l'air, de l'eau, de la forêt.

Le plus grand est le dieu du ciel, Ukks, qui est «le père des Brises», «le Pâtre des agneaux-nuages». L'éclair est son glaive, l'arc-en-ciel son arc; son jupon lance des étincelles de feu, ses bas sont bleus, et ses souliers de couleur cramoisie.

Les filles du Soleil et de la Lune sont assises sur les bords écarlates des nuages et tissent les rayons de lumière en une toile brillante.

Untar préside aux brouillards et aux brumes, et les passe à travers un tamis d'argent avant de les envoyer sur la terre.

Ahto, le dieu de la vague, habite «avec son épouse au cœur froid et cruel» Wellamo, au fond de la mer dans l'abîme des Rochers aux Saumons, et possède le trésor sans prix du Sampo, le talisman du succès.

Quand les branches des chênes primitifs cachèrent aux régions du Nord la lumière du soleil, Pikku-Mies (Pygmée) émergea de la mer entièrement vêtu de cuivre, avec une hachette de cuivre à la ceinture, et étant parvenu à une stature gigantesque, il abattit en trois coups de sa hachette l'immense chêne.

«Wirokannas» est le prêtre à la robe verte, de la forêt, et Tapio, qui porte un vêtement en mousse d'arbre, et un haut chapeau en feuilles de pin, est le «Dieu gracieux des grands bois».

Otso, l'ours, est «la Patte de miel des montagnes, l'ami des forêts, à la robe de fourrure».

En toute chose visible ou invisible, il y a un dieu, une divinité présente.

Il y a trois mondes, et tous peuplés de divinités.

Quant au poème lui-même, il est en vers trochaïques de huit syllabes, avec allitération et écho dans le cours du vers. C'est le mètre dans lequel Longfellow a écrit Hiawatha.

L'un de ses traits caractéristiques est une admirable passion pour la nature, et pour la beauté des objets de la nature.

Lemenkainen dit à Tapio:

 
«Dieu des forêts, à la barbe noire,
avec ton chapeau et ton vêtement d'hermine,
habille les arbres des fibres les plus fines,
couvre les bosquets des tissus les plus riches,
donne aux sapins le luisant de l'argent,
revêts d'or les baumes élancés,
donne aux bouleaux leur ceinture cuivrée
et aux pins leur contour d'argent,
donne aux bouleaux des fleurs d'or,
couvre leurs troncs d'un réseau d'argent.
Tel était leur costume au temps d'autrefois,
quand les jours et les nuits avaient plus d'éclat,
quand les sapins brillaient comme la lumière du soleil,
et les bouleaux comme les rayons de la lune.
Que le miel embaume toute la forêt,
qui s'étend dans les vallons et sur les montagnes;
que des parfums rares se répandent sur les bords des prés,
que l'huile coule à flot des terres basses.»
 

Tous les métiers, tous les travaux d'art sont écrits, comme dans Homère, avec un minutieux détail:

 
Alors le forgeron Ilmarinen,
l'éternel artiste-forgeron,
dans la fournaise, forgea un aigle
avec le feu de l'antique savoir.
Pour cet oiseau géant de magie
il forgea des grilles de fer.
Il lui fit le bec d'acier et de cuivre.
Il s'asseoit lui-même sur l'aigle,
sur le dos, entre les os des ailes,
et parle en ces termes à sa créature.
Il donne son ordre à l'oiseau de feu:
«Puissant aigle, oiseau de beauté,
dirige ton vol du côté où je t'enverrai,
vers le fleuve Tuoni, noir comme le charbon,
vers les profondeurs bleues du fleuve de la Mort.
Saisis le puissant poisson de Mana.
Empare-toi pour moi de ce monstre aquatique
 

Et la construction d'une barque par Wainamoinen est un des grands épisodes du poème:

 
Wainamoinen, vieux et habile,
l'éternel faiseur de merveilles,
construit son vaisseau avec enchantement,
construit son bateau par art et magie.
Avec la charpente que fournit le chêne,
il en fait la quille et les flancs et le fond.
Il chante une chanson et la charpente est jointe.
Il en chante une seconde, et les flancs sont assemblés.
Il chante une troisième fois, et les taquets de nages sont fixes
rames et côtés et gouvernail façonnés,
les côtés et les flancs unis ensemble.
Maintenant il fait un pont au vaisseau magique.
Il peint le bateau en bleu et écarlate,
il orne avec de l'or le gaillard d'avant,
il couvre la proue avec de l'argent fondu.
Il lance à l'eau son magnifique vaisseau qui glisse
sur les rouleaux faits de sapin.
Maintenant il dresse les mâts en bois de pin,
sur chaque mât les voiles de toile
voiles bleues, et blanches et écarlates,
tissées en un tissu le plus fin.
 

Tous les traits caractéristiques d'une antique et splendide civilisation se reflètent dans ce merveilleux poème, et l'admirable traduction de M. Crawford devrait rendre les merveilleux héros de Suomi aussi familiers, sinon plus chers à notre peuple, que les héros de la grande épopée ionienne.

Le Socialisme poétique 42

M. Stopford Brooke disait, il y a quelque temps, que le Socialisme et l'esprit socialiste donneraient à nos poètes des sujets plus nobles et plus élevés à chanter, élargiraient leurs sympathies, agrandiraient l'horizon de leur vision, et toucheraient, du feu et de l'ardeur d'une foi nouvelle, des lèvres qui, sans cela, resteraient silencieuses, des cœurs qui, sans cet évangile nouveau, resteraient froids.

Que gagne l'Art aux événements contemporains?

C'est toujours un problème attrayant, et un problème malaisé à résoudre.

Toutefois, il est certain que le Socialisme se met en marche bien équipé.

Il a ses poètes et ses peintres, ses conférenciers artistiques, ses caricaturistes malicieux, ses orateurs puissants, et ses écrivains habiles.

S'il échoue, ce ne sera point faute d'expression.

S'il réussit, son triomphe ne sera pas un triomphe de la simple force brutale.

La première chose qui frappe, quand on jette les yeux sur la liste de ceux qui ont fourni leur appoint aux Chants du Travail de M. Edward Carpenter, c'est la curieuse variété de leurs professions respectives. Ce sont les grandes différences de position sociale qui existent entre eux. C'est cette étrange mêlée d'hommes qu'a réunis un moment une passion commune.

 

L'éditeur est un «conférencier scientifique».

A sa suite, viennent un drapier, un porteur, puis deux ex-maîtres d'Eton, deux bottiers, et ceux-ci à leur tour font place à un ex-Lord-Maire de Dublin, à un relieur, à un photographe, à un ouvrier sur acier, à une femme-auteur.

Dans une même page, nous trouvons un journaliste, un dessinateur, un professeur de musique; dans une autre, un employé de l'état, un mécanicien-ajusteur, un étudiant en médecine, un ébéniste et un ministre de l'Église d'Écosse.

Certes ce n'est point un mouvement banal qui peut réunir en une étroite fraternité des hommes de tendances aussi différentes, et si nous mentionnons parmi les poètes M. William Morris, et disons que M. Walter Crane a dessiné la couverture et le frontispice du livre, nous ne pouvons ne pas sentir, comme nous l'avons déjà dit, que le socialisme se met en marche bien équipé.

Quant aux chants eux-mêmes, certains d'entre eux, pour citer la préface de l'éditeur: «sont purement révolutionnaires; d'autres ont un ton chrétien. Il y en a qu'on pourrait qualifier de simplement matériels dans leurs tendances tandis que d'autres ont un caractère hautement idéal et visionnaire».

Voilà qui, en somme, promet beaucoup.

Cela montre que le Socialisme n'entend pas se laisser ligoter par un credo dur et ferme, ni se mouler dans une formule de fer.

Il accueille bien des natures multiformes.

Il n'en repousse aucune, il a de la place pour toutes.

Il possède l'attrait d'une merveilleuse personnalité.

Il s'adresse au cœur de l'un, au cerveau de l'autre, il attire celui-ci par sa haine de l'injustice, son voisin par sa foi en l'avenir, un troisième, peut-être par son amour de l'art, ou par son culte ardent pour un passé mort et enterré.

Et de cela, tout est bien. Car rendre les hommes socialistes n'est rien, mais humaniser le socialisme est une grande chose.

Ils ne sont pas d'une très haute valeur littéraire, ces poèmes qui ont été si adroitement mis en musique.

Ils sont faits pour être chantés, non pour être lus.

Ils sont rudes, directs, vigoureux.

Les airs sont entraînants et familiers, et on peut dire que la première cohue venue les gazouillerait aisément.

Les transpositions qu'on a faites sont très amusantes:

«C'était dans Trafalgar-Square» est mis sur l'air de: «C'était dans la baie de Trafalgar».

«Debout, peuple!» chanson très révolutionnaire, par M. John Gregory, bottier, et qui a pour refrain:

 
Debout, peuple, ou descendez dans votre tombe!
Les lâches seront toujours esclaves,
 

doit se chanter sur l'air de Rule Britannia.

Le vieil air du Vicaire de Bray accompagnera la nouvelle Ballade de Loi et de l'Ordre, qui néanmoins, n'est point du tout une ballade, et, sur celui de Voici pour la timide fillette de quinze ans, la démocratie de l'avenir lancera de sa voix tonnante une des compositions lyriques les plus fortes et les plus touchantes de M. T. D. Sullivan.

Il est clair que les Socialistes entendent faire marcher l'éducation musicale du peuple du même pas que son éducation dans la science politique, et sur ce point, comme sur tous les autres, ils semblent complètement exempts de toute préoccupation étroite, de tout préjugé conventionnel.

Mendelsohn est imité par Moody et Sankey:43 La Garde sur le Rhin figure côte à côte avec la Marseillaise.

Lillibulero est un chœur de Norma; John Brown et un air de la Neuvième Symphonie de Beethoven leur sont tous également agréables.

Ils chantent l'hymne national dans la version de Shelley.

La voix du labeur de M. William Morris, à la cadence fluide de «Vous, rives et landes de Bonny Doon». Victor Hugo parle quelque part du cri terrible «du tigre populaire» mais, il est évident, d'après le livre de M. Carpenter, que si jamais la Révolution éclatait en Angleterre, ce ne serait point en un rugissement inarticulé, mais plutôt en de charmantes chansons, en de gracieux couplets.

On gagnerait certainement au change.

Néron jouait du violon pendant que Rome brûlait, du moins à ce que disent des historiens inexacts, mais c'est pour bâtir une cité éternelle que les Socialistes de nos jours se sont occupés de faire de la musique et ils ont une entière confiance dans les instincts artistiques du peuple.

 
Ils disent que le peuple est brutal,
qu'en lui sont mort les instincts de beauté.
Si c'était vrai, honte à ceux qui le condamnent
à la lutte désespérée pour le pain!
Mais ils mentent en leur gorge, quand ils parlent ainsi
Car le peuple a le cœur tendre,
et une source profonde de beauté se cache
sous la fièvre et la douleur aiguë de sa vie.
 

Voilà une stance prise dans une des poésies de ce volume, et le sentiment exprimé en ces mots domine partout.

La Réforme gagna beaucoup de terrain en employant les airs populaires de cantiques.

Les Socialistes paraissent décidés à conquérir la faveur du peuple par des moyens analogues. Mais ils feront bien d'être modestes dans leur attente.

Les murs de Thèbes s'élevèrent au son de la musique, et Thèbes fut une cité vraiment bien sotte.

Essais, par M. Brander Matthews 44

«Si vous tenez à ce que votre livre soit apprécié favorablement, faites vous une bonne réclame dans votre préface.»

Telle est la règle d'or formulée pour servir de guide aux auteurs par M. Brander Matthews dans un amusant essai sur l'art d'écrire une préface et mettant sa théorie en pratique, il annonce son volume comme «le plus intéressant et le plus instinctif de la décade.»

Amusant, il l'est certainement par endroits.

L'Essai sur le poker, par exemple, est écrit avec beaucoup de verve et d'agrément.

M. Proctor blâmait le poker par une raison assez triviale.

C'était pour lui une manière de mensonge, et autre raison plus sérieuse, il offrait des occasions très favorables pour tricher.

A vrai dire, la seule existence de ce jeu, en dehors des tapis-francs était, selon lui, «un des phénomènes les plus monstrueux de la civilisation américaine.»

M. Brander Matthews répond à ces graves accusations que bluffer se réduit à la «Suppressio veri» et que cet acte exige du joueur une forte dose de courage physique.

Quant à l'acte de tricher, il soutient que le poker n'offre pas plus d'occasions pour l'exercice de cet art que le Whist ou l'Écarté, tout en admettant que l'attitude à prendre en face d'un adversaire dont la veine est indûment persistante, est celle de l'Allemand d'Amérique qui trouvant quatre as dans son jeu, était naturellement disposé à parier, quand il lui vint une idée soudaine:

– Qui a distribué les cartes? demanda-t-il.

– Jakey Einstein, lui répondit-on.

– Jakey Einstein! répéta-t-il en abattant son jeu. Alors je passe.

L'histoire de ce jeu paraîtra fort intéressante à tout amateur des cartes.

Ainsi que la plupart des produits franchement nationaux de l'Amérique, il semble avoir été importé de l'étranger, et on peut en suivre l'origine jusqu'à un jeu italien du quinzième siècle.

L'Euchre fut probablement acclimaté sur le Mississipi par les voyageurs canadiens.

C'est une forme du jeu français de triomphe.

Un citoyen du Kentucky, désirant dire à ses fils quelques mots d'avis pour leur conduite future dans la vie, les convoqua autour de son lit de mort et leur parla ainsi:

– Mes gars, quand vous descendrez le fleuve jusqu'à la Nouvelle-Orléans, méfiez-vous d'un certain jeu appelé le Yucker, où le valet est plus fort que l'as. Ce n'est pas chrétien.

Et cet avis donné, il s'allongea et mourut en paix.

Et c'était à l'Euchre que jouaient ces deux gentlemen, à bord d'un bateau sur le Mississipi, quand un spectateur, scandalisé de la fréquence avec laquelle un des joueurs tournait le valet, prit la liberté d'avertir l'autre joueur que le gagnant prenait les cartes de dessous.

Ce à quoi le perdant, sûr de savoir se défendre, répondit d'un ton bourru:

– Bah! je suppose bien qu'il le fait. C'est son tour de donner.

Le chapitre sur l'Antiquité des mots pour rire avec sa proposition d'une exposition internationale de plaisanteries, est des plus remarquables.

Une exposition de ce genre, comme le remarque M. Matthews, aurait du moins pour effet de détruire tout ce qui reste d'autorité au bon vieux dicton d'après lequel il n'existe au monde que trente-huit bonnes plaisanteries et que trente-sept ne peuvent être dites devant des dames et la section rétrospective serait d'un grand secours pour tout folkloriste digne de ce nom.

Car la plupart des bonnes histoires de notre temps appartiennent en réalité au folklore, sont des mythes survivants, des échos du passé.

Les deux proverbes américains bien connus: «Nous avons eu un enfer de temps» et «que l'autre marche» sont l'un et l'autre suivis jusqu'à leur origine par M. Matthews.

Le premier se retrouve dans les lettres de Walpole, le second dans une histoire que le Pogge raconte à un habitant de Pérouse qui s'en allait, l'air mélancolique, parce qu'il ne pouvait pas payer ses dettes: «Va! Stulte, lui fut-il conseillé, laissez l'inquiétude à vos créanciers.»

Même la brillante riposte faite par M. Evart quand on lui dit que Washington avait une fois lancé un dollar au delà du Pont Naturel en Virginie: «En ces temps-là un dollar allait bien plus loin que de nos jours» paraît descendre en ligne directe d'une spirituelle remarque de Foote, quoique dans ce cas, nous préférions le fils au père.

L'Essai sur le français tel que le parlent ceux qui ne parlent pas français est aussi écrit d'une façon très fine d'ailleurs. Sur tous les sujets, excepté en littérature, M. Matthews mérite d'être lu.

En littérature et sur les sujets littéraires, il est certainement tout à fait piteux.

L'Essai sur l'Éthique du plagiat, avec son pénible effort pour réhabiliter M. Rider Haggard, et les sottes remarques sur l'admirable article de Poë, au sujet de «M. Longfellow et autres plagiaires» est extrêmement terne et banal, et dans le laborieux parallèle qu'il établit entre M. Frédéric Locker et M. Austin Dobson, l'auteur de Plume et Encre montre qu'il est absolument dépourvu de toute vraie faculté critique, de toute finesse de tact pour discerner entre les vers courants de société et l'œuvre exquise d'un très-parfait artiste en poésie.

Nous ne trouvons point mauvais que M. Matthews compare M. Locker et M. Du Maurier, M. Dobson ou M. Randolph Caldecott, et M. Edwin Abbey.

Ces sortes de comparaisons, si elles sont très sottes, ne font aucun mal.

En fait, elles ne signifient rien, et selon toute apparence, on ne veut pas qu'elles aient une portée.

D'autre part, nous sommes réellement tenus de protester contre les efforts de M. Matthews pour confondre la poésie de Piccadilly avec la poésie du Parnasse.

Nous dire, par exemple que le vers de M. Dobson «n'a point la clarté condensée, ni la vigueur incisive de M. Locker» est vraiment trop mauvais, même pour de la critique transatlantique.

Pour peu qu'on se pique de se connaître en littérature on se gardera de rapprocher ces deux noms.

M. Locker a écrit quelques agréables vers de société, quelques bagatelles rimées à mettre en musique, admirablement bien faites pour les albums de dames et les magazines.

Mais citer pêle-mêle Herrick, Suckling et M. Austin Dobson, c'est chose absurde.

 

Herrick n'est point un poète.

D'autre part, M. Dobson, a produit des pièces absolument classiques dans leur exquise beauté de forme.

Rien qui ait plus de perfection artistique en son genre que les Vers à une jeune Grecque n'a été écrit de notre temps.

Ce petit poème restera dans les mémoires, aussi longtemps qu'y restera Thyrsis et Thyrsis ne sera jamais oublié.

Tous deux ont ce caractère de distinction qui est si rare en ces jours de violence, d'exagération et de rhétorique.

Certes, quand on avance comme le fait M. Matthews que les pièces de M. Dobson appartiennent à «la littérature forte», on dit une chose ridicule.

Elles ne visent point à la force et elles ne la réalisent point.

Elles ont d'autres qualités, et dans leur sphère délicatement circonscrite, elles n'ont point de rivales contemporaines; il n'en est même aucune qui se place au second rang après elles.

Mais M. Matthews ne s'effraye de rien et s'évertue à traîner M. Locker en dehors de Piccadilly, où il était tout à fait dans son élément, et à le planter sur le Parnasse, où il n'a pas le droit de prendre place, où il ne réclamerait point une place.

Il loue son œuvre avec le zèle étourdi d'un commissaire-priseur éloquent.

Ces vers d'une grande banalité, et même d'une légère vulgarité, sur un Crâne humain:

 
Il a peut-être contenu (pour émettre au hasard quelques idées),
ton cerveau, o Eliza Fry! ou celui de Baron Byron;
l'esprit de Nell Gwynne, ou du docteur Watts.
Deux bardes qu'on cite. Deux sirènes philanthropes.
Mais, j'espère, cela s'entend bien,
qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme, qu'ils aient été adorés ou détestés,
l'être qui posséda ce crâne ne fut pas tout à fait aussi bon,
ni tout à fait aussi mauvais que bien des gens l'ont affirmé.
 

Ces vers-là lui paraissent «avoir de la gaîté et de l'éclat» «être pleins d'un humour agréable,» et il faut «y relever deux choses en particulier: l'individualité et la franchise de l'expression.»

Individualité, franchise d'expression! Nous nous demandons quel est pour M. Matthews le sens de ces mots.

M. Locker n'a pas de chance avec son lourdaud d'admirateur américain.

Comme il doit rougir en lisant ce panégyrique pesant!

Il faut dire que M. Matthews lui-même a du moins un accès de remords d'avoir tenté de mettre l'œuvre de M. Locker à côté de l'œuvre de M. Dobson, mais comme il arrive après les accès de remords, cela n'aboutit à rien.

Dès la page suivante, nous l'entendons se plaindre de ce que le vers de M. Dobson n'a point la «clarté condensée» et la «vigueur incisive» de celui de M. Locker.

M. Matthews devait s'en tenir à ses ingénieux articles de journaux sur l'Euchre, le Poker, le mauvais français et les plaisanteries d'antan.

Sur ces sujets-là, il sait «écrire des choses drôles» selon sa propre expression.

Il écrit aussi «des choses drôles» sur la littérature, mais la drôlerie n'est pas tout à fait aussi amusante.

41Pall Mall Gazette, 12 février 1889.
42Pall Mall Gazette, 15 février 1889.
43Moody, prédicateur et poète américain, que l'organiste Sankey accompagnait dans ses tournées.
44Pall Mall Gazette, 27 février 1889, à propos de Plume et encre
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