Pour L’éternité, et un Jour

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Из серии: L’Hôtel de Sunset Harbor #5
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Читает Muriel Redoute Blondeau
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Pour L’éternité, et un Jour
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P O U R L ’ É T E R N I T É E T U N J O U R

(L’HÔTEL DE SUNSET HARBOR – TOME 5)

S O P H I E L O V E

Sophie Love

Fan depuis toujours du genre romantique, Sophie Love est ravie de la parution de sa première série de romance : Maintenant et à tout jamais (L’Hôtel de Sunset Harbor – tome 1).

Sophie adorerait recevoir de vos nouvelles, donc s’il vous plaît visitez www.sophieloveauthor.com pour lui envoyer un e-mail, rejoindre la liste de diffusion, recevoir des e-books gratuits, apprendre les dernières nouvelles, et rester en contact!

Copyright© 2016 par Sophie Love. Tous droits réservés. Sauf dérogations autorisées par la Loi des États-Unis sur le droit d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, distribuée ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stockée dans une base de données ou système de récupération, sans l'autorisation préalable de l'auteur.

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Il s'agit d'une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les évènements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilisés dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou mortes, n'est que pure coïncidence.

Image de couverture : Copyright Phase4Studios, utilisée en vertu d'une licence accordée par Shutterstock.com.

LIVRES PAR SOPHIE LOVE

L’HÔTEL DE SUNSET HARBOR

MAINTENANT ET À TOUT JAMAIS (Tome 1)

POUR TOUJOURS ET À JAMAIS (Tome 2)

POUR TOUJOURS, AVEC TOI (Tome 3)

SI SEULEMENT C’ÉTAIT POUR TOUJOURS (Tome 4)

POUR L’ÉTERNITÉ, ET UN JOUR (Tome 5)

POUR L’ÉTERNITÉ, PLUS UN (Tome 6)

TABLE DES MATIÈRES

CHAPITRE UN

CHAPITRE DEUX

CHAPITRE TROIS

CHAPITRE QUATRE

CHAPITRE CINQ

CHAPITRE SIX

CHAPITRE SEPT

CHAPITRE NEUF

CHAPITRE DIX

CHAPITRE ONZE

CHAPITRE DOUZE

CHAPITRE TREIZE

CHAPITRE QUATORZE

CHAPITRE QUINZE

CHAPITRE SEIZE

CHAPITRE DIX-SEPT

CHAPITRE DIX-NEUF

CHAPITRE VINGT

CHAPITRE VINGT-ET-UN

CHAPITRE VINGT-DEUX

CHAPITRE VINGT-TROIS

CHAPITRE VINGT-QUATRE

CHAPITRE VINGT-CINQ

CHAPITRE VINGT-SIX

CHAPITRE VINGT-SEPT

ÉPILOGUE

CHAPITRE UN

« Papa ? », répéta Emily.

Elle dévisageait l’homme sur les marches de sa véranda, un homme qu’elle reconnaissait à peine désormais. Des cheveux grisonnant là où autrefois ils avaient été noirs. L'ombre du chaume sur son menton. Des sillons et des rides recouvraient son visage. Mais il n'y avait aucun doute. C'était son père.

Les mots lui manquaient. Elle ne pouvait pas reprendre son souffle.

Les pattes d’oies au coin des yeux de Roy se creusèrent tandis qu'il souriait. « Emily Jane », répondit-il.

C'est alors qu'Emily sut que c'était réel. Il était réel. C'était son père.

Elle courut aussi vite qu’elle le pouvait le long des marches de la véranda et se jeta dans ses bras. Elle avait imaginé ce moment tant de fois, se demandant comment elle se comporterait si jamais il revenait vers elle. Dans son imagination, elle agissait de manière détendue, froide, s’était élevée au-dessus de tout cela en ne lui permettant pas de voir la douleur que sa disparition lui avait causée, ni le pur soulagement qu'elle ressentait en sachant qu'il était sain et sauf. Mais bien sûr la réalité était complètement différente. Au lieu d'être dans la confrontation, elle passa ses bras autour de son cou et le serra comme si elle était encore une enfant.

Il était chaud, solide. Elle pouvait le sentir respirer fort, chaque gonflement de ses poumons trahissait ses émotions. Ses larmes vinrent presque immédiatement. Comme en réponse, elle sentit les siennes mouiller ses joues et son cou.

« Tu es revenu », réussit à dire Emily, dont la voix se brisa pendant qu'elle parlait. Elle sonnait aussi jeune et vulnérable qu'elle avait l’impression de l’être.

« Je l’ai fait », répondit Roy à travers de profonds sanglots. « Je suis— »

Mais il s’arrêta net. Emily savait instinctivement que le seul mot pour conclure cette phrase était “désolé” mais que son père n'était pas encore prêt à faire face au torrent d'émotions que prononcer ce mot déclencherait. Emily ne l’était pas non plus. Elle ne voulait pas encore prendre une voie si douloureuse. Elle voulait juste rester dans ce moment. Savourer ça.

Elle perdit la notion du temps qui s’écoulait pendant qu'elle et son père se tenaient là enlacés, mais elle sentit un changement soudain dans la façon dont son père la tenait, une tension dans ses muscles, comme s’il était tout à coup mal à l’aise. Elle s’écarta de lui et regarda par-dessus son épaule pour voir sur quoi le regard de Roy était maintenant braqué : Chantelle.

Elle se tenait debout dans l’ouverture de la porte de l’hôtel, une expression confuse sur son visage comme si elle essayait de comprendre la scène étrange qui se déroulait devant elle. Emily pouvait lire toutes les questions dans ses yeux. Qui est cet homme ? Pourquoi Emily pleure-t-elle ? Pourquoi lui aussi ? Que se passe-t-il ?

« Chantelle, ma chérie », dit Emily, tendant la main. « Viens ici. »

Emily vit dans l'hésitation de Chantelle une timidité inhabituelle.

« Il n'y a rien à craindre », ajouta Emily.

Chantelle fit quelques pas vers Emily. « Pourquoi est-ce qu’il me regarde comme ça ? », dit-elle dans un aparté que Roy pouvait très bien entendre.

Emily regarda vers son père. Ses yeux humides étaient écarquillés par la confusion. Il essuya les gouttes de ses cils.

« Tu as une fille ? », balbutia-t-il enfin, la voix pleine d'émotion.

« Oui », dit Emily en tendant la main vers Chantelle et en attirant la jeune fille à côté d’elle, dans une demi-étreinte. « Enfin, c'est la fille de Daniel. Mais je l'élève comme une mère le ferait. »

Chantelle s'accrocha à Emily. « Est-ce qu'il va m’emmener ? », demanda-t-elle.

« Oh non, non, chérie », s'écria Emily. « C'est mon père. Ton grand-père. » Elle tourna alors le regard pour croiser celui son père. « Papa Roy ? », suggéra-t-elle.

Il hocha immédiatement de la tête. Il semblait ensorcelé par l'enfant, ses yeux bleu pâle étincelaient, intrigués.

« Elle lui ressemble tellement », dit-il.

Emily comprit sur le champ ce qu'il voulait dire. Chantelle ressemblait à Charlotte. Pas étonnant qu'il ait supposé qu'elle était l'enfant d'Emily ; Emily elle-même avait parfois du mal à croire que ce n’étaient pas les gènes de Charlotte qui s’exprimaient chez Chantelle.

« Je le vois aussi », avoua-t-elle.

« À qui je ressemble ? », demanda Chantelle.

Emily eut l’impression que tous ces questionnements étaient trop pour l'enfant. Elle voulait y mettre fin tout de suite. Même si elle se sentait comme un agneau tremblant, elle savait qu'elle devait se mettre en avant et prendre la direction.

« Quelqu'un que nous connaissions il y a longtemps, c'est tout », dit-elle dit. « Allez, Papa Roy doit rencontrer papa. »

Chantelle s’illumina soudainement. « Je vais aller le chercher. » Elle rayonnait, et rentra à l'intérieur en sautillant.

 

Emily soupira. Elle comprenait pourquoi son père avait été tellement choqué par Chantelle, mais de voir un étranger la dévisager ainsi – comme si elle était un fantôme – c’était la dernière chose dont l'enfant avait besoin.

« Elle n'est pas biologiquement la tienne ? », demanda Roy à la seconde où l'enfant avait disparu.

Emily secoua la tête. « Je sais, c'est fou. Elle est aussi sensible qu'elle. Et gentille. Drôle. Créative. Je suis impatiente que tu fasses sa connaissance. » Sa voix se serra alors, avec une crainte soudaine à l’idée que Roy ne resterait pas, que ce n'était qu'une visite éclair. Peut-être n'était-elle même pas censée avoir su qu'il était ici. Peut-être que son plan était de l'éviter complètement, de passer en coup de vent avant qu’elle n’ait eu eu l'occasion de se rendre compte qu'il était de retour, comme ses voyages furtifs avec sa voiture défoncée que Trevor avait vu de sa fenêtre. Elle se frotta derrière l’oreille maladroitement. « Enfin, si tu as le temps. »

« J'ai le temps. » Roy acquiesça, un léger sourire apparaissant sur ses lèvres.

À cet instant-là, Chantelle revint, traînant Daniel derrière elle. Il s'arrêta sur le seuil de la porte et regarda Roy.

« Papa Roy ? », dit-il en levant les sourcils, répétant manifestement le nom que Chantelle lui avait si innocemment transmis.

Emily vit le regard qu’ils échangèrent et se souvint de ce que Daniel lui avait raconté à propos de cet été-là, quand il était adolescent et avait eu besoin d'un ami, comment Roy avait été là pour lui, l'avait aidé à remettre sa vie sur les rails. Elle pouvait dire à cet instant que le retour de Roy à Sunset Harbour comptait presque autant pour Daniel que pour elle-même.

Roy présenta sa main pour que Daniel la serre. Mais à la surprise d'Emily, Daniel prit la main et attira Roy dans une étreinte. Elle sentit un étrange serrement dans sa poitrine, une émotion particulière qui se trouvait entre la joie et le chagrin.

« Je pense que tu as déjà rencontré Daniel », dit Emily, sa voix se brisant encore une fois.

« En effet », répondit Roy alors qu'il était libéré par Daniel, le prenant à la place par les épaules. Il semblait submergé par l’émotion, louvoyant entre les larmes de joie et les éclats de rire soulagés.

« Nous allons nous marier », ajouta Emily, presque bêtement.

« Je sais », dit Roy, souriant d’une oreille à l’autre. « J'ai lu ton mail. Je suis tellement ravi. »

« Vous venez à l'intérieur ? », demanda Daniel à Roy, doucement.

« Si vous le permettez », répondit Roy, l’air préoccupé de ne pas être accepté dans la vie d'Emily.

« Bien sûr ! », s’exclama Emily. Elle serra sa main avec force, essayant de lui dire que tout allait bien, qu'il était désiré ici, accepté, que son retour était un évènement joyeux.

Le visage de Roy parut marqué par le soulagement. Il se détendit visiblement, comme si un obstacle pour lequel il s’était inquiété avait été franchi.

Tandis qu’ils marchaient vers la porte, Emily prit soudainement conscience du fait que la maison que son père avait abandonnée il y avait plus de vingt ans ne ressemblait en rien à son ancien état. Elle l’avait reprise, avait tout changé, modifié sa raison d’être, d'une maison familiale à un hôtel. Serait-il furieux ?

« Nous avons fait des rénovations », dit-elle rapidement.

« Emily Jane », répondit son père d'une voix douce et ferme, « je sais que tu vis ici. Que c’est un hôtel maintenant. C'est bon. Je suis ravi pour toi. »

Elle hocha de la tête, mais se sentait encore anxieuse à l’idée de le laisser entrer. Chantelle ouvrit la voie et, l'un après l'autre, ils pénétrèrent en file indienne dans le hall de réception, Roy en dernier, sa démarche plus lente et plus raide que dans les souvenirs d’Emily.

Il s'arrêta dans le hall et regarda autour de lui, bouche bée, avec surprise et crainte. Quand il vit le bureau, ses yeux s'écarquillèrent.

« Est-ce… ? »

« Le même que celui que tu as vendu à Rico ? », dit Emily. « Oui. »

L’hôtel avait été une pension avant que ses propriétaires ne l'abandonnent. L'histoire de Roy avec la demeure reflétait celle d’Emily à l'envers. Il avait voulu que cet endroit soit une maison familiale, un refuge pour les vacances d'été. Emily l'avait retransformé en maison d'hôtes, en entreprise.

« Je n’arrive pas à croire qu'il l'ait gardé pendant toutes ces années », dit Roy avec surprise, le regard toujours posé sur le bureau. Puis il tourna les yeux vers Emily. « Tu te souviens du jour où je l'ai vendu ? »

Emily secoua la tête en silence.

« Tu étais assez inflexible sur le fait que je ne devais pas le vendre », dit-il avec un rire. « Tu avais mis une Barbie dans chacun des tiroirs. Tu as dit que c'était un hôpital pour tes poupées. »

« Je pense que je m’en souviens », répondit Emily en se sentant un peu mélancolique.

« Rico a été très gentil à ce sujet », ajouta Roy. « Il t’a aidée à “transférer” tes “patientes” dans un autre endroit. Je pense que tu avais choisi le placard sous l'évier. » Lui aussi devint quelque peu mélancolique, et détourna son attention du bureau de réception et revint aux travaux de rénovation. « C'est vraiment incroyable. Tu as fait un excellent travail. »

La fierté dans sa voix secoua Emily. Ce moment constituait tellement plus que ce qu'elle aurait pu espérer. C'était parfait.

« Tu veux visiter ? », demanda-t-elle.

Roy acquiesça. Emily le conduisit d'abord dans la cuisine. À l'intérieur, ils pouvaient entendre les aboiements des chiens dans la buanderie.

« Je ne sais pas ce qu'il faut intégrer en premier », s'exclama Roy, contemplant autour de lui à la cuisine entièrement rénovée avec ses appareils et décorations rétro. « L'incroyable travail de rénovation ou le fait que tu aies des animaux de compagnie ! »

« C'est Mogsy et son petit Rain ! », annonça Chantelle, ouvrant la porte de la buanderie pour permettre aux deux de rentrer en courant.

Ils se précipitèrent vers Roy, le reniflèrent et essayèrent de lui lécher les joues. Roy se mit à rire, les ridules autour de son visage devinrent plus prononcées et il les gratta tous deux derrière les oreilles.

« Nous ne les laissons généralement pas courir dans la cuisine », expliqua Emily. « Mais comme c'est une occasion particulière — »

Sa voix s’étrangla alors que cet élan de mélancolie qu'elle avait ressenti plus tôt revenait. Être avec son père ne devrait pas être “spécial” ; c’était devenu ainsi à cause de son départ.

De sa position accroupie, il leva les yeux vers elle, l’expression remplie de regret.

D'un seul coup, Emily sentit la colère monter. Une partie de sa douleur profondément enterrée commençait à remonter en bouillonnant.

« Allons dans la salle à manger », dit-elle brusquement, ne voulant pas que ses émotions fassent surface.

Ils entrèrent dans la salle avec la grande table de chêne. Tout de suite, Roy remarqua que le drap lourd qui avait autrefois été suspendu sur la porte de la salle de bal n'était plus là.

« Vous avez trouvé la salle de bal », dit-il.

Quelque chose dans son commentaire irrita encore Emily. Ce n'était pas un jeu de cache-cache. Elle sentait la chaleur lui monter aux joues.

« Trouvée. Rénovée. Bientôt on s’y mariera », dit-elle, alors qu'ils passaient le long du couloir au plafond bas et émergeaient dans la grande salle de bal.

Elle pouvait entendre la raideur dans sa voix et prit une profonde inspiration pour se calmer.

« Eh bien, elle est magnifique », déclara Roy, soit inconscient de sa colère croissante, soit pas encore prêt à l'affronter. « Je suis surpris que les vitraux soient si beaux après tout ce temps. »

« L'ami de Daniel, George, les a restaurés », expliqua Emily.

« George ? », dit Roy en levant les sourcils. « Je me souviens de lui quand il faisait cette taille. » Il fit un geste de la main à la taille pour indiquer la taille d'un enfant.

Il vint alors à l’esprit d’Emily que Sunset Harbour était plus la ville de son père qu’elle n’avait jamais été la sienne, qu'il connaissait mieux les gens de ce lieu qu'elle, que durant les années où il avait vécu là, il s’était plus enraciné qu'elle ne pourrait jamais espérer l’être. Une jalousie nouvelle se répandit dans le mélange complexe de sentiments qu'elle essayait déjà de garder à distance. Elle faisait de son mieux pour garder une expression neutre.

Ils montèrent à l'étage plus tard et Emily montra à Roy la chambre principale, la pièce qui avait été autrefois la sienne et celle de Patricia, puis, probablement, la sienne et celle d'Antonia quand elle lui avait rendu visite, avant de devenir celle d’Emily et de Daniel.

« C'est fantastique », s'exclama Roy. « Les couleurs sont si fraîches. »

Il avait été beaucoup plus versé dans ses couleurs sombres, les sortes de pourpres et de teintes bleu marine avec lesquelles elle avait décoré les chambres de l’hôtel. Le blanc cassé et le bleu étaient bien plus proches des goûts de sa mère, et Emily réalisa pour la première fois en regardant sa chambre que son style était un mélange parfait de tous deux. Le penchant de Roy pour les antiquités – visible dans le gigantesque lit, la coiffeuse, l'ottomane – et la propreté de Patricia dans les couleurs blanches. Emily avait l'impression de redécouvrir la chambre.

« Ma chambre est à côté », dit Chantelle.

Emily fut soulagée de la distraction. Elle guida Roy hors de la pièce et dans celle de Chantelle, où il admira les délicieux meubles à décor animal qu’Emily avait achetés pour elle. Chantelle valsait autour de la pièce, montrant fièrement son étagère de livres, sa penderie remplie de robes, son tas de peluches, son mur d'œuvres d'art.

« Chantelle, tu as une chambre plutôt jolie », dit-il avec gentillesse, rappelant à Emily cette manière douce qu'il avait avec les enfants, la gentillesse avec laquelle il lui parlait quand il faisait partie de sa vie.

Chantelle rayonnait de fierté.

« Tu as choisi de ne pas la mettre dans la pièce que toi et Charlotte partagiez ? », dit-il. « La salle de jeu avec la mezzanine ? »

Emily ressentit un petit pincement dans la poitrine en l’entendant faire référence à sa chambre d'enfance. Il l'avait fermée après la mort de Charlotte, obligeant Emily à changer de pièce. Cela avait été le premier signe, Emily en prenait conscience maintenant, que son père n'allait pas intégrer la mort de Charlotte, que son décès allait devenir le catalyseur menant à son abandon.

« C'est la suite nuptiale », expliqua Daniel, prenant le relais alors qu'Emily restait muette. « La mezzanine était un excellent argument de vente. De plus, nous voulions Chantelle près de nous. »

L'émotion allait devenir trop pour Emily. Elle ignorait totalement qu'il était possible de ressentir tant de choses contradictoires et complexes à la fois. Elle réalisa soudain qu'une fois cette visite terminée, une fois qu'ils s’assoiraient face à face dans le salon, elle libérerait une explosion de rage à l’encontre de son père.

Elle sentit brusquement la main de ce dernier sur son bras, qui la soutenait, la rassurait. Elle regarda dans ses yeux bleus, vit en eux le chagrin et le regret, mélangés à un soulagement absolu. Il lui disait silencieusement que ça allait, qu’il comprenait sa colère. Elle n'avait pas besoin de la lui cacher.

Ils se baladèrent à travers le reste de l’étage, jetant un coup d'œil dans quelques-unes des chambres d'hôtes afin que Roy puisse avoir une idée de la décoration. Il hésita brièvement à côté de la porte de son bureau. La dernière fois qu'il avait été là, il avait été plus jeune de deux décennies, avec les cheveux noirs au lieu de gris, son corps plus mince et plus agile au lieu de la légère bedaine qui se trouvait maintenant au-dessus de sa ceinture.

« C'est le même », répondit Emily. « Je ne l'ai pas changé. »

Il hocha de la tête, mais ne prononça pas un mot. Elle se demanda s'il pensait à la myriade de documents qu'il avait verrouillés à l'intérieur de son bureau, qu’elle avait lus à présent. Les lettres et les secrets qu'elle avait trouvés. Emily savait qu'il n'y avait aucun moyen de savoir ce que Roy pensait. L'homme était autant un mystère pour elle maintenant qu'il l'avait toujours été.

Ils allèrent au troisième étage et Roy s’attarda pendant un moment à côté de l'escalier menant au belvédère. Avait-il la soirée du Nouvel An à l’esprit ? se demanda Emily. Celle où il lui avait dit de ne pas avoir peur, d'ouvrir les yeux et de regarder les feux d'artifice ? Ou avait-il oublié tous ces souvenirs comme elle l'avait fait autrefois ?

 

Chantelle sautillait tout autour, en lui montrant toutes les chambres vides. Elle avait l'air excitée qu’il soit là, et tellement fière de lui montrer sa maison. Emily aurait aimé se sentir aussi légère que l'enfant l’était, mais elle avait tant de choses en tête que cela l’emplissait d'angoisse.

« Je suis vraiment émerveillé par le travail que tu as accompli ici », dit Roy. « Ça n'a pas dû être facile de faire rentrer toutes ces salles de bains. »

« Ça ne l’a pas été », répondit Emily. « Nous n'avions qu’environ vingt-quatre heures pour le faire aussi. C’est une longue histoire. »

« J'ai le temps. » Roy sourit.

Emily ne savait même pas comment répondre à cela. Le temps n'était pas quelque chose qu'elle pouvait considérer pour acquis avec lui. Elle ne pouvait pas faire confiance à ses sentiments.

« Allons dans le salon », dit-elle durement. « Pour prendre quelque chose à boire ? » Puis, en réalisant sa bévue en proposant de l'alcool à un alcoolique, elle ajouta rapidement, « Du café. »

À chaque marche descendue, Emily sentait sa colère devenir plus forte. Elle détestait ce sentiment. Elle voulait que cette réunion soit joyeuse, mais comment pouvait-elle l’être, vraiment, quand elle avait tout ce ressentiment en elle ? Son père devait entendre parler de la douleur qu'il lui avait causée.

Ils atteignirent le couloir du rez-de-chaussée. Daniel se dirigea vers la cuisine pour préparer le café pendant que Chantelle menait Roy dans le salon. Il poussa une exclamation quand il vit les rénovations, la façon dont Emily avait mélangé nouveaux styles et vieux styles, comment elle avait intégré l'art moderne et les verreries Kandinsky.

« C’est mon ancien piano ? », demanda-t-il.

Emily acquiesça. « Je l’ai fait réparer. Le gars qui l'a fait, Owen, il joue ici parfois. Il jouera à notre mariage en fait. »

Pour la première fois, Emily éprouva une impression de triomphe. N'ayant pas vécu longtemps à Sunset Harbour, Owen n'était pas quelqu'un que son père avait connu avant elle, plus longtemps qu’elle, ou connaissait mieux qu'elle. Il y avait des gens ici qui étaient les siens, qui n'étaient pas souillés par l’aspect déplaisant de ce passé partagé.

« Owen m'aide avec mon chant », dit Chantelle.

« Oh, tu chantes ? », répondit Roy. « Est-ce que je peux en entendre un peu ? »

« Peut-être plus tard », coupa Emily. « Chantelle m'a promis qu'elle rangerait tous ses jouets aujourd'hui. »

« Je ne peux pas le faire plus tard ? », gémit Chantelle.

Elle voulait clairement passer plus de temps avec Papa Roy et Emily ne pouvait pas l’en blâmer. À la surface, il ressemblait à un doux géant, une sorte de Père Noël. Mais Emily ne pouvait pas continuer à afficher un sourire factice sur son visage juste pour Chantelle. Il était temps pour elle et son père de parler comme des adultes.

Emily secoua la tête. « Pourquoi est-ce que tu ne ferais pas sur le champ, puis tu auras toute la journée pour jouer avec Papa Roy, d'accord ? »

Chantelle céda et quitta la pièce en frappant des pieds.

« Tu as ouvert le bar clandestin », remarqua Roy, en regardant le bar tout juste restauré. Il semblait impressionné par la manière dont Emily avait conservé son époque de la même manière qu'il l’avait fait, un hommage au temps passé. « Vous savez que c'est un original. »

Elle acquiesça. « Je m’en doutais aussi. Sauf les bouteilles d'alcool. »

Sans Chantelle pour amortir la situation, une tension s’éleva entre eux. Emily fit un geste vers le canapé.

« Tu veux t’asseoir ? »

Roy hocha de la tête et s'installa. Son visage avait pâli, comme s'il avait senti que le moment de rendre des comptes approchait d’eux.

Mais avant qu'Emily n’en ait eu la chance, Daniel apparu avec un plateau contenant la cafetière, la crème, le sucre et les tasses. Il le posa sur la table basse. Le silence enfla tandis qu'il remplissait les tasses.

Roy s'éclaircit la gorge. « Emily Jane, si tu as des questions à me poser, tu le pouvez. »

La capacité d'Emily à rester polie et cordiale cessa. « Pourquoi est-ce que tu m'as laissée ? », dit-elle.

Daniel leva brusquement la tête avec surprise. Ses yeux étaient aussi larges que des soucoupes. Il n'avait probablement pas réalisé que la joie d'Emily vis-à-vis du retour de Roy avait également entraîné sa colère, qu'elle avait porté son émotion avec elle pendant toute la visite de la maison. Il se leva alors.

« Je devrais vous laisser du temps à tous les deux », dit-il poliment.

Emily tourna les yeux vers lui. Il avait l'air si maladroit, là debout, comme s'il empiétait soudain sur une affaire privée, et Emily se sentit un peu coupable d'avoir fait tourner si rapidement la conversation au vinaigre en sa présence, sans lui donner l'occasion de s'excuser d'une manière plus polie.

« Merci », dit-elle tandis qu’il sortait en hâte de la pièce.

Elle reporta son regard vers son père. Roy semblait blessé par sa douleur évidente, mais il respirait calmement et la dévisageait avec des yeux doux.

« J'étais brisé, Emily Jane », commença-t-il. « Après avoir perdu Charlotte, j'étais un homme brisé. Je buvais. J'avais des liaisons. Je me suis aliéné mes amis à New York jusqu'à ce que je ne puisse plus supporter d’être là. Ta mère et moi nous sommes séparés, bien que ça n’ait pas été une surprise. Je suis venu ici pour remettre ma vie en ordre. »

« Seulement tu ne l’as pas fait », répondit Emily avec véhémence. « Tu as fui. Tu m'as laissée. »

Elle pouvait sentir des larmes lui picoter les yeux. Ceux de son père devenaient eux aussi rouges et embués. Il regarda ses genoux, une expression de honte sur le visage.

« J'ignorais les choses », dit-il tristement. « Je pensais pouvoir prétendre que tout allait bien. Même si cela faisait des années depuis la mort de Charlotte, je ne m’étais pas vraiment permis de ressentir quoi que ce soit. Je ne suis jamais allé dans la pièce que vous partagiez, je t’ai fait changer pour une autre, si tu t’en souviens. »

Emily acquiesça. Elle se souvenait parfaitement que son père avait bloqué l'accès à certaines parties de la maison, définissant certaines zones comme hors limites pour elle pendant ses visites estivales – le belvédère, le troisième étage, les garages, son bureau, le sous-sol – jusqu'à ce qu'elle eût tout oublié, qu’ils avaient jamais existé ou ce qu'ils contenaient. Elle se souvenait de son comportement de plus en plus incohérent, de son obsession de collectionner des antiquités qui lui semblait être moins un passe-temps et plus une obsession, son accumulation compulsive. Mais de surcroît elle se souvenait de la réduction des contacts, du fait qu’elle passait de moins en moins de temps avec lui dans le Maine jusqu'à ses quinze ans et, un été, il n’était simplement pas venu la chercher. C'était la dernière fois qu'elle l'avait vu.

Emily voulait être compréhensive vis-à-vis des actes de son père. Mais bien qu'une part en comprenne qu'il ait été un homme brisé qui avait un jour craqué, le tourment que ses actions lui avaient causé ne pouvait trouver d’explications convaincantes.

« Pourquoi est-ce que tu n'as pas dit au revoir ? », dit Emily, dont les larmes tombaient à torrents sur ses joues. « Comment as-tu pu juste partir comme ça ? »

Roy, lui aussi, semblait être submergé par l’émotion. Emily remarqua que ses mains tremblaient. Ses lèvres tremblaient pendant qu’il parlait. « Je suis vraiment désolé. J'ai été hanté par cette décision. »

« Tu as été hanté ? », s’écria Emily. « Je ne savais pas si tu étais mort ou vivant ! Tu m’as laissé là à me poser la question, à ne pas savoir. As-tu idée de ce que ça fait à une personne ? Toute ma vie était en suspens à cause de toi ! Parce que tu étais trop lâche pour dire au revoir ! »

Roy prit ses mots comme des coups répétés au visage. Il avait l'air aussi affligé que s'ils avaient véritablement été des coups physiques qu'elle lui aurait assenés.

« C'était inexcusable », dit-il, à peine plus qu'un murmure. « Alors je ne vais pas essayer de l'excuser. »

Emily sentit son cœur tambouriner sauvagement dans sa poitrine. Elle était si furieuse qu'elle ne pouvait même plus y voir clair. Toutes ces années d'émotions se déversaient hors d'elle avec la force d'un tsunami.

« Est-ce que tu as pensé combien cela me blesserait ? », cria-t-elle, sa voix augmentant d’un ton et en volume.

Roy semblait saisi par l’angoisse, son corps tout entier tendu, le visage tordu par le regret. Emily était heureuse de le voir ainsi. Elle voulait qu'il souffre tout autant qu'elle l'avait fait.

« Pas au début », confessa-t-il. « Parce que je n’avais pas tous mes esprits. Je ne pouvais penser à rien ou personne d'autre que moi-même, ma propre douleur. Je pensais que tu serais mieux sans moi. »

Il fondit alors en larmes, les sanglots déchirant son corps jusqu'à ce qu'il tremble sous le coup de l'émotion. Le regarder comme ça fut comme un coup reçu au cœur. Emily ne voulait pas voir son père céder et s’effondrer devant ses yeux, mais il devait savoir. Il n'y aurait pas de passage à autre chose, pas de réparation sans que tout cela soit exposé au grand jour.

« Alors, tu pensais que partir serait m’accorder une faveur ? », dit sèchement Emily, croisant les bras contre sa poitrine dans un geste protecteur. « Tu sais à quel point c’est tordu ? »

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