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Henri IV (2e partie)

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Henri IV (2e partie)
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TRAGÉDIE
DEUXIÈME PARTIE

NOTICE
SUR LA DEUXIÈME PARTIE
DE HENRI IV

Henri V est le véritable héros de la seconde partie; son avénement au trône et le grand changement qui en résulte sont l'événement du drame. La défaite de l'archevêque d'York et celle de Northumberland ne sont que le complément des faits contenus dans la première partie. Hotspur n'est plus là pour donner à ces faits une vie qui leur appartienne, et l'horrible trahison de Westmoreland n'est pas de nature à fonder un intérêt dramatique. Henri IV mourant ne se montre que pour préparer le règne de son fils, et toute l'attention se porte déjà sur un successeur également important par les craintes et par les espérances qu'il fait naître.

Ce n'est pas tout à fait à l'histoire que Shakspeare a emprunté le tableau de ces divers sentiments. L'avénement de Henri V fut généralement un sujet de joie: Hollinshed rapporte que, dans les trois jours qui suivirent la mort de son père, il reçut de plusieurs «nobles hommes et honorables personnages,» des hommages et serments de fidélité tels que n'en avait reçu aucun des rois ses prédécesseurs 1, «tant grande espérance et bonne attente avait-on des heureuses suites qui par cet homme devaient advenir.» L'inconstante ardeur des esprits, entretenue par de fréquents bouleversements, faisait nécessairement d'un nouveau règne un sujet d'espérances; et les troubles qui avaient agité le règne de Henri IV, les cruautés qui en avaient été la suite, les continuelles méfiances qui devraient en résulter, portaient naturellement la nation à tourner les yeux vers un jeune prince dont, en ce temps de désordre, les déréglements choquaient beaucoup moins que ses qualités généreuses n'inspiraient de confiance. On attribuait d'ailleurs une partie de ces déréglements à la méfiance jalouse de son père, qui, en le tenant écarté des affaires auxquelles il se portait avec une grande ardeur, en lui ôtant même l'occasion de faire éclater ses talents militaires, avait jeté cet esprit impétueux dans des voies de désordre où les moeurs du temps ne permettaient guère qu'on s'arrêtât sans avoir atteint les derniers excès. Hollinshed attribue à la malveillance de ceux qui entouraient le roi Henri IV, non-seulement les soupçons qu'il était disposé à concevoir contre son fils, mais encore les bruits odieux répandus sur la conduite de ce prince. Il rapporte une occasion où le prince, ayant à se défendre contre certaines insinuations qui avaient mis la mésintelligence entre son père et lui, se rendit à la cour avec une suite dont l'éclat et le nombre n'étaient pas faits pour diminuer les soupçons du roi, et dans un costume assez singulier pour que le chroniqueur ait cru devoir en faire mention. C'était «une robe (a gowne, probablement un long manteau) de satin bleu remplie de petits trous en façon d'oeillets, et à chaque trou pendait à un fil de soie l'aiguille avec laquelle il avait été cousu.» Quoi qu'on puisse penser de la gêne des mouvements d'un homme vêtu d'une manière si inquiétante, le prince se jeta aux pieds de son père, et, après avoir protesté de sa fidélité, lui présenta son poignard, afin qu'il se délivrât de ses soupçons en le tuant, «et en présence de ces lords, ajouta-t-il, et devant Dieu au jour du jugement, je jure ma foi de vous le pardonner hautement.» Le roi attendri, jeta le poignard, embrassa son fils les larmes aux yeux, lui avoua ses soupçons, et déclara en même temps qu'ils étaient effacés. Le prince demanda la punition de ses accusateurs; le roi répondit que la prudence exigeait quelques délais, et ne punit point. Mais il paraît que l'opinion générale vengeait suffisamment le jeune prince; et sans croire précisément avec Hollinshed, qui d'ailleurs se contredit sur ce point, que Henri ait toujours eu soin «de contenir ses affections dans le sentier de la vertu», on est porté à supposer quelque exagération dans le récit des déportements de sa jeunesse rendus plus remarquables par la révolution subite qui les a terminés, et par l'éclat de gloire qui les a suivis.

Shakspeare devait naturellement adopter la tradition la plus favorable à l'effet dramatique; il a senti aussi combien le rôle d'un roi et d'un père mourant, inquiet sur l'avenir de son fils et de ses sujets, était plus propre à produire sur la scène un tableau touchant et pathétique; et de même qu'il a inventé pour la beauté de son dénoûment l'épisode de Gascoygne, il a ajouté, à la scène de la mort de Henri IV, des développements qui la rendent infiniment plus intéressante. Hollinshed rapporte simplement que le roi s'apercevant qu'on avait ôté sa couronne de dessus son chevet, et apprenant que c'était le prince qui l'avait emportée, le fit venir et lui demanda raison de cette conduite: «Sur quoi le prince, avec un bon courage, lui répondit: – Sire, à mon jugement et à celui de tout le monde, vous paraissiez mort. Donc, comme votre plus proche héritier connu, j'ai pris cette couronne comme mienne et non comme vôtre. – Bien, mon fils, dit le roi avec un grand soupir, quel droit j'y avais, Dieu le sait! – Bien, dit le prince, si vous mourez roi, j'aurai la couronne, et je me fie de la garder avec mon épée contre tous mes ennemis, comme vous avez fait. – Étant ainsi, dit le roi, je remets tout à Dieu et souvenez-vous de bien faire. Ce que disant, il se tourna dans son lit, et bientôt après s'en alla à Dieu.» Peut-être la réponse du jeune prince, rendue comme un poëte l'eût su rendre, aurait-elle été préférable au discours étudié que lui prête Shakspeare; cependant il en a conservé une partie dans la dernière réplique du prince de Galles, et le reste de la scène offre de grandes beautés, ainsi que celles qui suivent entre Gascoygne et les princes. En tout, Shakspeare paraît avoir voulu racheter par des beautés de détail la froideur nécessaire de la partie tragique; elle en offre beaucoup, et le style en est généralement plus soigné et plus exempt de bizarrerie que celui de la plupart de ses autres pièces historiques.

La partie comique, très-importante et très-considérable dans cette seconde partie de Henri IV, n'est cependant pas égale en mérite à ce qu'offre, dans le même genre, la première partie. Falstaff est parvenu, il a une pension, des grades; ses rapports avec le prince sont moins fréquents; son esprit ne lui sert donc plus aussi fréquemment à se tirer de ces embarras qui le rendaient si comique; et la comédie est obligée de descendre d'un étage pour le représenter dans sa propre nature, livré à ses goûts véritables et au milieu des misérables dont il fait sa société, ou des imbéciles qu'il a encore besoin de duper. Ces tableaux sont sans doute d'une vérité frappante et abondent en traits comiques, mais la vérité n'est pas toujours assez loin du dégoût pour que le comique nous trouve alors disposés à toute la joie qu'il inspire; et les personnages sur qui tombe le ridicule ne nous paraissent pas toujours valoir la peine qu'on en rie. Cependant le caractère de Falstaff est parfaitement soutenu, et se retrouvera tout entier quand on le verra reparaître ailleurs.

La seconde partie de Henri IV a paru, à ce qu'on croit, en 1598; avant cette époque, on représentait sur la scène anglaise une pièce intitulée les Fameuses Victoires de Henri V, sorte de farce tragi-comique dépourvue de tout mérite. Rien ne pourrait mieux faire comprendre que ce vieux drame la merveilleuse transformation qu'opéra Shakspeare dans les représentations théâtrales du siècle d'Elisabeth.

HENRI IV

TRAGÉDIE

DEUXIÈME PARTIE
PERSONNAGES

LE ROI HENRI IV.

HENRI, prince de Galles, )

ensuite roi sous le nom de )

Henri V. )

THOMAS, duc de Clarence. )

LE PRINCE JEAN de Lancastre,) ses fils

ensuite duc de Bedford. )

LE PRINCE HUMPHROY )

de Glocester, ensuite duc )

de Glocester. )

LE COMTE DE WARWICK. )

LE COMTE DE WESTMORELAND.) partisans

GOWER.) du roi

HARCOURT. )

Le GRAND JUGE du banc du roi.

UN GENTILHOMME attaché au grand juge.

LE COMTE DE NORTHUMBERLAND. )

SCROOP, archevêque d'York. )

LORD MOWBRAY.) ennemis

LORD HASTINGS.) du roi.

LORD BARDOLPH. )

SIR JOHN COLEVILLE. )

TRAVERS.) domestiques de Northumberland.

MORTON. )

FALSTAFF.

BARDOLPH.

PISTOL.

UN PAGE.

POINS. )

PETO.) attachés au prince Henri.

SHALLOW. )

SILENCE.) juges de comtés.

DAVY, domestique de Shallow.

MOULDY. )

SHADOW. )

WART.) recrues.

FEEBLE. )

BULLCALF. )

FANG. )

SNARE.) officiers du shérif.

LA RENOMMÉE.

UN PORTIER.

UN DANSEUR qui prononce l'épilogue.

LADY NORTHUMBERLAND.

LADY PERCY.

L'HÔTESSE QUICKLY.

DOLL TEAR-SHEET.

LORDS ET AUTRES PERSONNAGES DE SUITE,

OFFICIERS, SOLDATS, MESSAGERS,

GARÇONS DE CABARET, SERGENTS, PIQUEURS,

ETC.

PROLOGUE

À Warkworth. Devant le château de Northumberland
Entre LA RENOMMÉE, son vêtement parsemé de langues peintes

LA RENOMMÉE. – Ouvrez les oreilles: et qui de vous, lorsque la bruyante Renommée se fait entendre, voudra fermer les routes de l'ouïe? C'est moi qui, depuis l'Orient jusqu'aux lieux où s'abaisse l'Occident, faisant du vent mon cheval de voyage, divulgue sans cesse les entreprises commencées sur ce globe de la terre. Sur mes langues court sans cesse le scandale que je répands dans tous les idiomes, remplissant de bruits mensongers les oreilles des hommes. Je parle de paix, tandis que, cachée sous le sourire de la tranquillité, la haine déchire le monde. Et quel autre que la Renommée, quel autre que moi produit le terrible appareil des armées, et les préparatifs de défense, lorsque, gonflée d'autres maux, l'année monstrueuse paraît prête à donner des fils au féroce tyran de la guerre? – La Renommée est une flûte où soufflent les soupçons, les inquiétudes, les conjectures, et dont la touche est si simple et si facile qu'elle peut être jouée par le monstre stupide aux têtes innombrables, l'inconstante et factieuse multitude. Mais qu'ai-je besoin d'anatomiser ma personne ici, au milieu de ma propre famille? Pourquoi la Renommée se trouve-t-elle en ce lieu? Je cours devant la victoire du roi Henri qui, dans les plaines sanglantes de Shrewsbury, a terrassé le jeune Hotspur et ses guerriers, éteignant le flambeau de l'audacieuse révolte dans le sang même des rebelles. Mais à quoi pensai-je de débuter par dire ici la vérité! Mon rôle est plutôt de répandre au loin que Henri Monmouth a succombé sous la colère du noble Hotspur, que le roi lui-même a baissé, aussi bas que le tombeau, sa tête sacrée devant la rage de Douglas. Voilà les bruits que j'ai semés au travers des villes rustiques situées entre ces plaines royales de Shrewsbury, et cette masse de pierres inégales, repaire vermoulu où le père de Hotspur, le vieux Northumberland, contrefait le malade. Les messagers arrivent épuisés, et pas un d'eux n'apporte d'autres nouvelles que celles qu'ils ont apprises de moi. Ils reçoivent des langues de la Renommée, de flatteurs et consolants mensonges, pires que le récit des maux véritables.

 
(Elle sort.)

ACTE PREMIER

SCÈNE I

Au même endroit
LE PORTIER est devant la porte. Entre lord BARDOLPH

BARDOLPH. – Qui garde la porte ici? Holà! – Où est le comte?

LE PORTIER. – Sous quel nom vous annoncerai-je?

BARDOLPH. – Dis au comte que le lord Bardolph l'attend ici.

LE PORTIER. – Sa Seigneurie est allée se promener dans le verger. Que Votre Honneur veuille bien prendre la peine de frapper seulement à la porte, et il va vous répondre lui-même.

(Entre Northumberland.)

BARDOLPH. – Voilà le comte.

NORTHUMBERLAND. – Quelles nouvelles, lord Bardolph? Chaque minute aujourd'hui devrait enfanter quelque nouveau fait. Les temps sont désordonnés, et la Discorde, comme un coursier échauffé par une trop forte nourriture, a brisé son frein avec fureur et renverse tout sur son passage.

BARDOLPH. – Noble comte, je vous apporte des nouvelles sûres de Shrewsbury.

NORTHUMBERLAND. – Bonnes, s'il plaît à Dieu!

BARDOLPH. – Aussi bonnes que le coeur les peut désirer. – Le roi est blessé presque à mort; et de la main de milord votre fils, le prince Henri tué roide; les deux Blount tués par Douglas; le jeune prince Jean, Westmoreland et Stafford ont fui du champ de bataille; et le cochon de Henri Monmouth, le lourd sir Jean est prisonnier de votre fils. Oh! jamais depuis les jours de bonheur de César, aucun temps n'a été illustré d'une pareille journée si bien défendue, si bien conduite, et si complétement gagnée.

NORTHUMBERLAND. – D'où tenez-vous ces nouvelles? Avez-vous vu le champ de bataille? Venez-vous de Shrewsbury?

BARDOLPH. – J'ai parlé, milord, à quelqu'un qui en venait, un gentilhomme de bonne race et d'un nom recommandable, qui m'a de lui-même raconté ces nouvelles comme véritables.

NORTHUMBERLAND. – J'aperçois Travers, mon domestique, que j'avais envoyé mardi dernier pour tâcher d'apprendre quelques nouvelles.

BARDOLPH. – Milord, je l'ai dépassé sur la route; il ne sait rien de certain que ce qu'il peut avoir appris de moi.

(Entre Travers.)

NORTHUMBERLAND. – Eh bien, Travers, quelles bonnes nouvelles nous apportez-vous?

TRAVERS. – Milord, sir Jean Umfreville m'a fait retourner sur mes pas avec de joyeuses nouvelles. Comme il était mieux monté que moi, il m'a devancé. Après lui j'ai vu venir, piquant avec ardeur, un cavalier presque épuisé de la rapidité de sa course, qui s'est arrêté près de moi pour laisser souffler son cheval tout ensanglanté: il s'est informé du chemin de Chester; et je lui ai demandé des nouvelles de Shrewsbury. Il m'a dit que la cause des rebelles n'avait pas été heureuse, et que l'éperon du jeune Henri Percy était refroidi. En disant ces mots, il abandonne la bride à son cheval courageux, et, courbé en avant, il enfonce ses éperons tout entiers dans les flancs haletants de la pauvre bête, et partant d'un élan, sans attendre d'autres questions, il semblait dans sa course dévorer le chemin.

NORTHUMBERLAND. – Ah! – Répète. – Il t'a dit que l'éperon du jeune Percy était refroidi? Qu'Hotspur était sans vigueur? Que les rebelles avaient été malheureux?

BARDOLPH. – Milord, je n'ai que cela à vous dire. Si le jeune lord votre fils n'a pas l'avantage, sur mon honneur je consens à donner ma baronnie pour un lacet de soie; n'en parlons plus.

NORTHUMBERLAND. – Eh pourquoi donc le cavalier qui a rencontré Travers lui aurait-il donné les indices d'une défaite?

BARDOLPH. – Qui? Lui? Bon, c'était quelque misérable qui avait volé le cheval qu'il montait, et qui, sur ma vie, a parlé au hasard: mais, tenez, voici encore des nouvelles.

(Entre Morton.)

NORTHUMBERLAND. – Mais quoi, le front de cet homme, semblable à la couverture d'un livre, annonce un volume du genre tragique. Tel est l'aspect du rivage lorsqu'il porte encore la trace de la tyrannique invasion des flots. Parle, Morton, viens-tu de Shrewsbury?

MORTON. – Mon noble lord, je fuis de Shrewsbury, où la mort détestée a revêtu ses traits les plus hideux pour porter l'effroi dans notre parti.

NORTHUMBERLAND. – Comment se portent mon fils et mon frère? – Tu trembles, et la pâleur de tes joues est plus prompte que ta langue à me révéler ton message. Tel, et ainsi que toi défaillant, inanimé, sombre, la mort dans les yeux, vaincu par le malheur, parut celui qui dans la profondeur de la nuit ouvrant le rideau de Priam, essaya de lui dire que la moitié de la ville de Troie était consumée; Priam vit la flamme avant que son serviteur eût pu retrouver la voix. Et moi, je vois la mort de mon cher Percy avant que tu me l'annonces. Je vois que tu voudrais me dire: «Votre fils a fait ceci et ceci; votre frère cela; ainsi a combattu le noble Douglas:» tu voudrais arrêter mon oreille avide sur le récit de leurs vaillantes prouesses, mais l'arrêtant en effet tout à coup, un soupir gardé pour la fin va dissiper d'un souffle toutes ces louanges, et terminer tout par ces mots: «Frère, fils, tous sont morts.»

MORTON. – Douglas est vivant et votre frère aussi, mais pour milord votre fils…

NORTHUMBERLAND. – Quoi, il est mort! Vois combien la crainte est prompte! Celui qui ne fait que redouter encore ce qu'il voudrait ne pas apprendre sait par instinct démêler dans les yeux d'autrui que ce qu'il redoute est arrivé. – Cependant parle, Morton; dis à ton maître que sa prescience lui a menti, et je recevrai cela comme un affront qui m'est cher; et je t'enrichirai pour récompense de cette injure.

MORTON. – Vous êtes trop grand pour que je vous contredise. Votre pressentiment n'est que trop vrai, et vos craintes que trop fondées.

NORTHUMBERLAND. – Malgré tout, cela ne dit pas que Percy soit mort. Je vois un cruel aveu dans tes regards; tu secoues la tête, et tiens pour dangereux ou criminel de dire la vérité. S'il est tué, dis-le; ce ne sera point une faute que d'annoncer sa mort: c'en est une que de mentir sur une mort véritable, mais non pas de dire que le mort ne vit plus.

MORTON. – Cependant celui qui le premier apporte une fâcheuse nouvelle est chargé d'un office où tout est perte pour lui. De ce moment sa voix prend le son d'une cloche funèbre qu'on se rappelle toujours accompagnant de son tintement la mort d'un ami.

BARDOLPH. – Non, milord, je ne puis croire que votre fils soit mort.

MORTON. – Je suis bien affligé d'être obligé de vous forcer à croire ce que je demanderais au ciel de n'avoir pas vu. Mais mes propres yeux l'ont vu, sanglant, épuisé hors d'haleine, et ne répondant plus que par de faibles coups à ceux d'Henri Monmouth, dont la rapide fureur a renversé Percy, jusqu'alors invincible, sur la poussière, d'où il ne s'est plus depuis relevé vivant. La mort de ce héros, dont l'ardeur enflammait le plus stupide manant de son camp, une fois ébruitée, a glacé l'ardeur du plus brillant courage de son armée: car c'était de la trempe de son âme que son parti empruntait la fermeté de l'acier; une fois qu'elle a été détruite en lui, tout le reste s'est affaissé sur soi-même, comme un plomb inerte et lourd; et de même qu'une masse pesante de sa nature vole avec d'autant plus de vitesse qu'elle est lancée par une force supérieure; ainsi, lorsque la perte de Hotspur eut appesanti nos soldats, ce poids reçut de la peur une telle rapidité, que la flèche volant vers son but ne surpasse pas en légèreté nos soldats voulant chercher leur salut loin du champ de bataille. Alors le noble Worcester fut trop tôt fait prisonnier; et ce fougueux Écossais, le sanglant Douglas, dont l'active et laborieuse épée avait tué jusqu'à trois fois la ressemblance du roi, commença à mollir et perdre coeur, et honora de son exemple la honte de ceux qui tournaient le dos! La frayeur le fit trébucher en fuyant, et il fut pris. Enfin, le résumé de tout ceci, c'est que le roi a la victoire; et il a envoyé un détachement avec ordre de marcher à grands pas contre vous, milord, sous la conduite du jeune Lancastre et de Westmoreland. Voilà toutes les nouvelles.

NORTHUMBERLAND. – J'aurai assez de temps pour pleurer ce malheur. Dans le poison se trouve le remède. Cette nouvelle, si j'eusse joui de la santé, m'aurait rendu malade; me trouvant malade, elle m'a en quelque sorte guéri. Ainsi qu'un malheureux dont les nerfs affaiblis par la fièvre fléchissent, comme des gonds sans force, sous le poids de la vie, et qui dans l'impatience de son accès s'élance, semblable à la flamme, des bras de son gardien; ainsi mes membres, affaiblis par la douleur, trouvent dans la rage de la douleur une force triple de leur vigueur naturelle. Loin d'ici, faible béquille; maintenant c'est un gantelet écailleux avec des charnières d'acier qui doit revêtir cette main. Loin de moi aussi, bonnet de malade, trop incertaine sauvegarde d'une tête que des princes fortifiés par la conquête aspirent à frapper. Ceignez de fer mon front. Vienne l'heure la plus effroyable qu'osent annoncer la haine et les circonstances; qu'elle menace de ses regards Northumberland au désespoir; que le ciel et la terre se confondent; que la main de la nature ne contienne plus l'impétuosité des flots; que l'ordre périsse; et que ce monde cesse d'être un théâtre où la discorde se nourrit de languissantes querelles; que l'esprit de Caïn le premier-né s'empare de tous les coeurs; que, toutes les âmes se précipitant dans une sanglante carrière, cette terrible scène finisse en laissant aux ténèbres le soin d'ensevelir les morts.

TRAVERS. – Ce violent transport aggrave votre mal, milord.

BARDOLPH. – Cher comte, ne faites pas divorce avec votre prudence.

MORTON. – La vie de tous vos confédérés qui vous aiment repose sur votre santé; si vous vous abandonnez ainsi à des passions orageuses, elle doit nécessairement dépérir. Mon noble lord, vous vous êtes déterminé à risquer les chances de la guerre, et avant de dire: rassemblons une armée, vous avez calculé la somme de tous ses hasards. Vous avez supposé d'avance que dans la dispensation des coups votre fils pouvait périr; vous saviez qu'il marchait sur les périls, sur un bord escarpé où la chute était plus vraisemblable que le salut; vous étiez bien averti que sa chair était susceptible de blessures et de plaies, et que son ardent courage le lancerait toujours aux lieux où serait plus actif le commerce des dangers; et cependant vous lui avez dit: marche. Nulle de ces considérations, bien que vivement présentes à votre imagination, n'a pu vous détourner de cette entreprise obstinément résolue dans votre âme. Qu'est-il donc arrivé? ou qu'a produit cette entreprise audacieuse, sinon l'événement qui devait probablement advenir?

BARDOLPH. – Nous tous qui sommes intéressés dans cette perte, nous savions que nous nous hasardions sur une mer si dangereuse qu'il y avait dix contre un à parier que nous y laisserions la vie. Cependant nous en avons couru les risques. Pour conquérir l'avantage que nous nous proposions, nous avons étouffé la considération du péril presque évident que nous avions à redouter. Puisque nous avons fait naufrage, hasardons encore. Venez; nous mettrons tout dehors, corps et biens.

 

MORTON. – Il en est plus que temps; et, mon noble et digne lord, j'ai appris avec certitude, et ce que je vous dis ici est véritable, que le noble archevêque d'York était en marche à la tête d'une armée bien disciplinée. C'est un homme qui attache à lui ses partisans par un double lien. Votre fils, milord, n'avait que les corps, des ombres, des simulacres de soldats. Ce mot de rébellion séparait leurs âmes de l'action de leurs corps. Ils ne combattaient qu'avec répugnance et contrainte, comme on avale une médecine. Leurs armes semblaient seules de notre parti; car pour leur courage et leurs âmes, ce mot de rébellion les avait congelés comme le poisson dans un étang glacé. Mais aujourd'hui l'archevêque tourne l'insurrection en entreprise religieuse: regardé comme un homme de pures et saintes pensées, il est suivi à la fois des corps et des âmes; sa puissance s'élève fortifiée par le sang du beau roi Richard versé sur les pierres de Pomfret. Il fait descendre du ciel sa querelle et sa cause; il annonce à tous qu'il veut délivrer une terre ensanglantée, respirant à peine sous le puissant Bolingbroke; grands et petits s'assemblent par troupeaux pour le suivre.

NORTHUMBERLAND. – Je le savais auparavant; mais je l'avoue, cette douleur présente l'avait effacé de ma mémoire. Entrez avec moi, et que chacun donne son avis sur les moyens les plus favorables à notre sûreté et à notre vengeance. Faisons partir des courriers et des lettres; hâtons-nous de nous faire des amis: jamais on n'en eut si peu, et jamais on eut tant de besoin d'en avoir.

(Ils sortent.)
1Chroniques de Hollinshed, t. II, p. 543.
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