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Le nain noir

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CHAPITRE XIII

 
«Il faut que le drapeau de la rébellion
«Par de vives couleurs frappe l'attention;
«Qu'il attire les yeux de cette sotte engeance,
«Mécontents, novateurs bouffis d'extravagance;
«Qui, la bouche béante, et se frottant les mains,
«Approuvent à grands les discours des mutins»
 
Henri IV, part. II.

On, avait fait de grands préparatifs au château d'Ellieslaw pour recevoir en ce jour mémorable non seulement les gentilshommes du voisinage attachés à la dynastie des Stuarts, mais encore les mécontents subordonnés que le dérangement de leurs affaires, l'amour du changement, le ressentiment contre l'Angleterre, ou quelque autre des causes nombreuses qui firent fermenter toutes les passions à cette époque, avaient déterminés à prendre part à la conspiration. Il ne s'y trouvait pas un grand nombre de personnes distinguées par leur rang et leur fortune. La plupart des grands propriétaires attendaient prudemment l'événement; la noblesse du second ordre et les fermiers pratiquaient généralement le culte presbytérien, de sorte que, quoique mécontents de l'Union, ils étaient peu disposés à prendre parti dans une conspiration jacobite. On y voyait pourtant quelques riches gentilshommes que leurs opinions politiques, leurs principes religieux, ou leur ambition, rendaient complices de celle d'Ellieslaw, et quelques jeunes gens qui, pleins d'ardeur et d'étourderie, ne cherchaient, comme Mareschal, que l'occasion de se signaler par une entreprise hasardeuse, du succès de laquelle devait résulter, suivant eux, l'indépendance de leur patrie; les autres membres de cette assemblée étaient des hommes d'un rang inférieur et sans fortune, qui étaient prêts à se soulever dans ce comté d'Écosse, comme ils le firent depuis en 1715 sous Forster et Derwentwater, quand on vit une troupe, sous les ordres d'un gentilhomme des frontières, nommé Douglas, composée presque entièrement de pillards, parmi lesquels le fameux voleur Luck-in-Bag avait un grade élevé.

Nous avons cru devoir donner ces détails, applicables seulement à la province où se passe notre histoire. Ailleurs le parti, jacobite était plus nombreux et mieux composé.

Une longue table occupait toute la vaste enceinte de la grand'salle d'Ellieslaw-Castle, qui était encore à peu près dans le même état que cent ans auparavant. Cette sombre et immense salle, qui s'étendait tout le long d'une aile du château, était voûtée. Les arceaux du cintre semblaient continuer en quelque sorte les diverses sculptures gothiques dont les formes fantastiques menaçaient de leurs regards ou de leurs dents de pierre les convives réunis. Cette salle était éclairée par des croisées longues et étroites, en verres de couleur, qui n'y laissaient pénétrer qu'une lumière sombre et décomposée. Une bannière, que la tradition disait avoir été prise sur les Anglais à la bataille de Sark, flottait au-dessus du fauteuil d'où Ellieslaw présidait à table, comme pour enflammer le courage de ses hôtes, en leur rappelant les victoires de leurs ancêtres. Ellieslaw était ce jour-là dans un costume de cérémonie; ses traits réguliers, quoique d'une expression farouche et sinistre, rappelaient ceux d'un ancien baron féodal. Sir Frédéric Langley était à sa droite, et Mareschal de Mareschal Wells à sa gauche: après eux venaient toutes les personnes de considération, et parmi elles M. Ratcliffe; le reste de la table était occupé par les subalternes; et ce qui prouve que le choix de cette partie de la société n'avait pas été fait avec grand scrupule; c'est que Willie de Westhurnflat eut l'audace de s'y présenter. Il espérait sans doute que la part qu'il avait prise à l'enlèvement de miss Vere n'était connue que des personnes qui avaient intérêt elles-mêmes à ne pas divulguer ce secret.

On servit un dîner somptueux, consistant principalement, non en délicatesses de la saison, selon l'expression des gazettes modernes, mais en énormes plats de viandes, dont le poids faisait gémir la table. Les convives du bas bout gardèrent quelque temps le silence, contenus parle respect qu'ils éprouvaient pour les personnages illustres dans la société desquels ils se trouvaient pour la première fois de leur vie. Ils sentaient la même gêne et le même embarras dont P. P., clerc de la paroisse, confessé avoir été accablé lorsqu'il psalmodia, pour la première fois, en présence des honorables personnages. M. le Juge Freeman, la bonne lady Jones, et le grand sir Thomas Huby. Leurs verres, qu'ils avaient soin de vider et de remplir souvent, leur firent pourtant bientôt briser la glace de cette cérémonie; et autant ils avaient été réservés et tranquilles au commencement du dîner, autant, vers la fin, ils devinrent communicatifs et bruyants.

Mais ni le vin, ni les liqueurs spiritueuses, n'eurent le pouvoir d'échauffer l'esprit de ceux qui se trouvaient au haut bout de la table. Ils éprouvèrent ce serrement de coeur, ce froid glacial qui se fait souvent sentir lorsque, ayant pris une résolution désespérée, on se trouve placé de manière qu'il est aussi dangereux d'avancer que de reculer. Plus ils approchaient du précipice, plus ils le trouvaient profond; et chacun attendait que ses associés lui donnassent l'exemple de la résolution en s'y précipitant les premiers. Ce sentiment intérieur agissait différemment, suivant les divers caractères des convives. L'un semblait sérieux et pensif, l'autre de mauvaise humeur et bourru quelques-uns regardaient, d'un air d'inquiétude, les places restées vides autour de la table, et réservées pour les membres de la conspiration qui, ayant plus de prudence que de zèle, n'avaient pas encore jugé à propos d'afficher si publiquement leurs projets. Sir Frédéric était distrait et boudeur. Ellieslaw lui-même faisait des efforts si pénibles pour échauffer l'enthousiasme de ses convives, qu'on voyait évidemment que le sien était considérablement refroidi. Ratcliffe restait spectateur attentif, mais désintéressé. Mareschal, fidèle à son caractère, conservait son étourderie et sa vivacité, mangeait, buvait, riait, plaisantait, et semblait-même s'amuser en voyant les figures allongées de ses compagnons.

– Pourquoi donc le feu de notre courage semble-t-il éteint aujourd'hui? s'écria-t-il; on dirait que nous sommes à un enterrement où ceux qui mènent le deuil ne doivent que chuchoter à voix basse, tandis que ceux qui vont porter le mort en terre. (montrant le bout de la table) boivent et se réjouissent dans la cuisine. Ellieslaw, votre esprit semble endormi! Et qu'est-ce qui a flétri les espérances du brave chevalier du vallon de Langley?

– Vous parlez comme un insensé, dit Ellieslaw: ne voyez-vous pas combien il nous manque de monde?

– Et qu'importe? ne saviez-vous donc pas d'avance que bien des gens parlent beaucoup et agissent peu? Quant à moi, je me trouve fort encouragé en voyant que plus des deux tiers de nos amis ont été exacts au rendez-vous. Je ne m'y attendais ma foi pas. Au surplus, je soupçonne qu'une bonne moitié d'entre eux sont venus autant pour le dîner que pour tout autre motif.

– Aucune nouvelle n'annonce le débarquement du roi, dit un de ses voisins de ce ton incertain qui indique un défaut de résolution.

– Nous n'avons eu aucune lettre du comte de D***; nous ne voyons pas un seul gentilhomme du sud des frontières.

– Quel est celui qui demande encore des hommes d'Angleterre? s'écria Mareschal avec un ton affecté de tragédie héroïque:

Mon cousin! cher cousin, le trépas nous menace.

– De grâce, Mareschal, dit Ellieslaw, trêve de folies en ce moment.

– Eh bien!, je vais vous étonner, je vais vous donner une leçon de sagesse. Si nous nous sommes avancés comme des fous, il ne faut pas reculer comme des lâches. Nous en avons fait assez pour attirer sur nous les soupçons et la vengeance du gouvernement. Attendrons-nous la persécution, sans rien faire pour l'éviter?.. Quoi! personne ne parle, eh bien! je sauterai le fossé le premier.

Se levant en ce moment, il remplit son verre d'un Bordeaux généreux; et, étendant la main pour obtenir du silence, il engagea toute la compagnie à l'imiter. Quand tous les verres furent pleins, et tous les convives debout: – Mes amis, s'écria-t-il, voici le toast du jour: A l'indépendance de l'Écosse et à la santé de son souverain légitime, le roi Jacques VIII, déjà débarqué dans le Lothian, et, j'espère, en possession de son ancienne capitale.

Il vida son verre, et le jeta par-dessus sa tête.

– Il ne sera jamais profané par une autre santé ajouta t-il.

Chacun suivit son exemple; et, au milieu du bruit des verres qui se brisaient et des applaudissements de toute la compagnie, on jura de ne quitter les armes qu'après avoir réussi dans le dessein qui les avait fait prendre.

– Vous avez effectivement sauté le fossé, dit Ellieslaw à voix basse à son cousin, et vous l'avez fait devant témoins. Au surplus, il était trop tard pour renoncer à notre entreprise. Un seul homme a refusé le toast, ajouta-t-il en jetant les yeux, sur Ratcliffe; mais nous en parlerons dans un autre moment.

Alors, se levant à son tour, il adressa à la compagnie un discours plein d'invectives contre le gouvernement, déclama contre la réunion de l'Écosse à l'Angleterre, qui avait privé leur patrie de son indépendance, de son commerce et de son honneur, et qui l'avait étendue enchaînée aux pieds de son orgueilleuse rivale, contre laquelle elle avait courageusement défendu ses droits pendant tant de siècles. En faisant vibrer cette corde, il était sûr de toucher le coeur de tous ceux qui l'écoutaient.

– Il n'est que trop sûr que notre commerce est anéanti, s'écria le vieux John Rewcastle, contrebandier de Jedburgh, qui se trouvait au bas bout de la table.

– Notre agriculture est ruinée, dit le laird de Broken-Girth-Flow, dont le territoire n'avait rapporté depuis le déluge que de la bruyère et de l'airelle.

 

– Notre religion est anéantie, dit le pasteur épiscopal de Kirkwhistle, remarquable par son nez bourgeonné.

– Nous ne pourrons bientôt plus tirer un daim; ou embrasser une jolie fille, dit Mareschal, sans un certificat du presbytère et du trésorier de l'église.

– Ou boire un verre d'eau-de-vie le matin, sans une licence du commis de l'excise, ajouta le contrebandier.

– Ou nous promener au clair de lune, dit Westburnflat, sans l'agrément du jeune Earnscliff, ou de quelque juge de paix à l'anglaise. C'était le bon temps, quand nous n'avions ni paix ni juges.

– Souvenons-nous des massacres de Glencoe (Glencoe, fameux par le massacre des partisans de Jacques II), continua Ellieslaw, et prenons les armes pour défendre nos droits, nos biens, notre vie et nos familles.

– Songez à la véritable ordination épiscopale, sans laquelle point de clergé légitime, dit le prêtre de l'assemblée.

– Songez aux pirateries commises sur notre commerce des Indes occidentales par les corsaires anglais, dit William Willicson, propriétaire par, moitié et seul patron d'un petit brick.

– Souvenez-vous de vos privilèges, reprit Mareschal qui semblait prendre un malin plaisir à souffler le feu de l'enthousiasme allumé par lui, comme un écolier espiègle qui, ayant levé l'écluse d'un moulin d'eau, s'amuse du bruit des roues qu'il a mises en mouvement, sans penser au mal qu'il peut produire, – Souvenez-vous de vos privilèges et de vos libertés, s'écriait-il. Maudits soient les taxes, la presse et le presbytérianisme, avec la mémoire du vieux Guillaume qui nous les apporta le premier!

– Au diable le jaugeur de l'excise, dit le vieux Rewcastle; je l'assommerai de ma propre main.

– Au diable le garde des forêts et le constable, s'écria Westburnflat, j'ai à leur offrir deux balles à chacun d'eux.

– Nous sommes donc tous d'accord que cet état de choses ne peut se supporter plus long-temps? dit Ellieslaw après un moment de calme.,

– Tous… sans exception… jusqu'au dernier! s'écria-t-on de toutes parts.

– Pas tout-à-fait, messieurs, dit M. Ratcliffe, qui n'avait pas ouvert la bouche depuis le commencement du dîner. Je ne puis espérer de calmer les transports violents qui viennent de s'emparer si subitement de la compagnie; mais autant que peut valoir l'opinion d'un seul homme, je dois vous déclarer que je n'adopte pas tout-à-fait les principes que vous venez de manifester;, je proteste donc formellement contre les mesures insensées que vous paraissez disposés à prendre pour faire cesser des sujets de plaintes dont la justice ne me paraît pas encore bien, démontrée. Je suis très porté à attribuer tout ce qui s'est dit à la chaleur du festin, peut-être même à l'envie de faire une plaisanterie; mais il faut songer que certaines plaisanteries peuvent devenir dangereuses quand elles transpirent, et que souvent les murs ont des oreilles.

– Les murs peuvent avoir des oreilles, monsieur Ratcliffe, s'écria Ellieslaw en lançant sur lui un regard de fureur; mais un espion domestique n'en aura bientôt plus, s'il ose rester plus long-temps dans une maison où son arrivée fut une insulte, où sa conduite a toujours été celle d'un homme présomptueux qui se mêle de donner des avis qu'on ne lui demande pas, et d'où il sera chassé comme un misérable, s'il ne se rend justice en en sortant sur-le-champ.

– Je sais parfaitement, monsieur, répondit Ratcliffe avec un sang-froid méprisant, que la démarche inconsidérée que vous allez faire vous rend ma présence, inutile, et qne mon séjour ici serait dorénavant aussi dangereux pour moi que désagréable pour vous; mais vous avez oublié votre prudence en me menaçant; car bien certainement vous ne seriez pas charmé que je fisse à ces messieurs, à des hommes d'honneur, le détail des causes qui ont amené notre liaison. Au surplus, j'en vois-la fin avec plaisir; mais, comme je crois que M. Mareschal et quelques autres personnes de la compagnie voudront bien me garantir pour cette nuit mes oreilles et surtout mon cou, pour lequel j'ai quelques raisons de craindre davantage, je ne quitterai votre château que demain matin.

– Soit, monsieur, répliqua Ellieslaw, vous n'avez rien à redouter, parce que vous êtes au-dessous de mon ressentiment, et non parce que j'ai à craindre que vous ne découvriez quelque secret de famille, quoique je doive vous engager, par intérêt pour vous-même, à bien peser vos paroles. Vos soins et votre entremise ne sont plus rien pour un homme qui a tout à perdre ou tout à gagner, suivant le résultat des efforts qu'il va faire pour la cause à laquelle il. s'est dévoué. Adieu.

Ratcliffe jeta sur lui un regard expressif qu'Ellieslaw ne put soutenir sans baisser les yeux, et, saluant la compagnie, il se retira.

Cette conversation avait produit sur une partie de ceux qui l'avaient entendue une impression qu'Ellieslaw se hâta de dissiper, en faisant retomber l'entretien sur les affaires du jour. On convint que l'insurrection serait organisée sur-le-champ. Ellieslaw, Mareschal et sir Frédéric Langley en furent nommés les chefs, avec pouvoir de diriger toutes les mesures ultérieures. On fixa, pour le lendemain de bonne heure, un lieu de rendez-vous où chacun se trouverait en armes avec tous les partisans qu'il pourrait rassembler.

Tout ayant été ainsi réglé, Ellieslaw demanda à ceux qui restaient encore à boire avec Westburnflat et le vieux contrebandier, la permission de se retirer avec ses deux collègues; afin de délibérer librement sur les mesures qu'ils avaient à prendre. Cette excuse fut acceptée d'autant plus volontiers qu'Ellieslaw y joignit l'invitation de ne pas épargner sa cave. Le départ des chefs fut salué par de bruyantes acclamations, et les santés d'Ellieslaw, de sir Frédéric, et surtout celle de Mareschal, furent portées plus d'une fois en grand chorus pendant le reste de la soirée.

Lorsque les trois chefs se furent retirés dans un appartement séparé, ils se regardèrent un moment avec une sorte d'embarras qui, sur le front soucieux de sir Frédéric, allait jusqu'au mécontentement.

Mareschal fut le premier à rompre le silence. – Hé bien! messieurs, dit-il avec un éclat de rire, nous voilà embarqués! – Vogue la galère!

– C'est vous que nous devons en remercier, dit Ellieslaw.

– Cela est vrai; mais je ne sais pas si vous me remercierez encore, lorsque vous aurez lu cette lettre. Je l'ai reçue à l'instant de nous mettre à table, et elle a été remise à mon domestique par un homme qu'il ne connaît pas, et qui est parti au grand galop, sans vouloir s'arrêter un instant. – Lisez.

Ellieslaw prit la lettre d'un air d'impatience, et lut ce qui suit:

«Édimbourg…

«MONSIEUR,

«Ayant des obligations à votre famille, et sachant que vous êtes en relation d'affaires avec Jacques et compagnie, autrefois négociants à Londres, maintenant à Dunkerque, je crois devoir me hâter de vous faire part que les vaisseaux que vous attendiez n'ont pu aborder, et ont été obligés de repartir sans avoir pu débarquer aucunes marchandises de leur cargaison. Leurs associés de l'ouest ont résolu de séparer leurs intérêts des leurs, les affaires de cette maison prenant une mauvaise tournure. J'espère que vous profiterez de cet avis pour prendre les précautions nécessaires pour vos intérêts.

«Je suis votre très humble serviteur

«NIHIL NAMELESS (Sans nom. Anonyme.)

«A RALPH-MARESCHAL DE MARESCHAL-WELLS.

«Très pressée.»

Sir Frédéric pâlit, et son front se rembrunit en entendant cette lecture.

– Si la flotte française, ayant le roi à bord, s'écria Ellieslaw, a été battue par celle d'Angleterre, comme ce maudit griffonnage semble le donner à entendre, le principal ressort de notre entreprise se trouve rompu, et nous n'avons pas même de secours à attendre, de l'ouest de l'Écosse. Et où en sommes-nous donc?

– Où nous en étions ce, matin, je crois, dit Mareschal toujours riant.

– Pardonnez-moi, monsieur Mareschal; faites trêve, je vous prie, à des plaisanteries fort déplacées. Ce matin, nous n'étions pas encore compromis; nous ne nous étions pas déclarés publiquement, comme nous venons de le faire, grâce à votre inconséquence. Et dans quel moment? quand vous aviez en poche une lettre qui ajoute aux difficultés de notre entreprise, et rend la réussite presque impossible.

– Oh! je savais bien tout ce que vous alliez me dire; mais d'abord cette lettre de mon ami anonyme peut ne contenir pas un mot de vérité; ensuite sachez que je suis las de me trouver dans une conspiration dont les chefs ne font toute la journée que former des projets qu'ils oublient en dormant. En ce moment le gouvernement est dans la sécurité, il n'a ni troupes ni munitions; et dans quelques semaines il aura pris ses mesures. Le pays est aujourd'hui plein d'ardeur pour une insurrection; donnez-lui le temps de se refroidir, et nous resterons seuls. J'étais donc bien décidé, comme nous l'avons dit, à me jeter dans le fossé, et j'ai pris soin de vous y faire tomber avec moi. Vous voilà dans la fondrière, il faudra bien maintenant que vous preniez le parti de vous évertuer pour en sortir.

– Vous vous êtes trompé, monsieur Mareschal, au moins quant à l'un de nous, dit sir Frédéric en tirant le cordon de la sonnette., car je vais demander mes chevaux à l'instant.

– Vous ne nous quitterez pas, sir Frédéric, dit Ellieslaw; nous avons notre revue demain matin.

– Je pars à l'instant même, dit sir Frédéric, et je vous écrirai mes intentions à mon arrivée chez moi.

– Oui-dà! dit Mareschal, et vous nous les enverrez sans doute par une compagnie de cavalerie de Carlisle, pour nous emmener prisonniers? – Écoutez-moi bien, sir Frédéric Langley: je ne suis pas un de ces hommes qui se laissent abandonner ou trahir. Si vous sortez aujourd'hui du château d'Ellieslaw, ce ne sera qu'en marchant sur mon cadavre.

– N'êtes-vous pas honteux, Mareschal? dit Ellieslaw; comment pouvez-vous interpréter ainsi les intentions de notre ami? il a trop d'honneur pour penser à déserter notre cause. Il ne peut oublier d'ailleurs les preuves que nous avons de son adhésion à tous nos projets, et de l'activité qu'il a mise à en assurer la réussite. Il doit savoir aussi que le premier avis qu'on en donnera au gouvernement sera bien accueilli, et qu'il nous est facile de le gagner de vitesse.

– Dites vous et non pas nous, s'écria Mareschal, quand vous parlez de gagner de vitesse pour se déshonorer par une trahison. Quant à moi, jamais je ne monterai à cheval dans un tel dessein. – Un joli couple d'amis pour leur confier sa tête! ajouta-t-il entre ses dents.

– Ce n'est point par des menaces dit sir Frédéric, qu'on m'empêche d'agir comme je le juge convenable, et je partirai bien certainement. Je ne suis point obligé, ajouta-t-il en regardant Ellieslaw, de garder ma parole à un homme qui a manqué à la sienne.

– En quoi y ai-je manqué? dit Ellieslaw, imposant silence par un geste à son impatient cousin; parlez, sir Frédéric; de quoi avez-vous à vous plaindre?

– D'avoir été joué relativement à l'alliance à laquelle vous aviez consenti, et qui, comme vous ne l'ignorez pas, devait être le gage de notre liaison politique. Cet enlèvement de miss Vere, si admirablement concerté, sa rentrée si miraculeuse, la froideur qu'elle m'a témoignée, les excuses dont vous avez cherché à la couvrir; ce ne sont que des prétextes dont vous êtes bien aise de vous servir pour conserver la jouissance des biens qui lui appartiennent, et auxquels vous devez renoncer en la mariant. Vous avez voulu faire de moi un jouet pour vous en servir dans une entreprise désespérée, et voilà pourquoi vous m'avez donné des espérances sans avoir intention de les réaliser.

– Sir Frédéric, je vous proteste par tout ce qu'il y a de plus sacré…

– Je n'écoute pas vos protestations, elles m'ont abusé trop long-temps.

– Mais songez donc que si nous nous divisions, votre ruine est aussi certaine que la nôtre. C'est de notre union que dépend notre sûreté.

– Laissez-moi le soin de la mienne; mais, quand ce que vous dites serait vrai, j'aimerais mieux mourir que d'être votre dupe plus long-temps.

– Rien ne peut-il vous convaincre de ma sincérité? Ce matin, j'aurais repoussé vos soupçons injustes comme une insulte; mais dans la position où nous, nous trouvons…

– Vous vous trouvez obligé d'être sincère? dit sir Frédéric en ricanant; vous n'avez qu'un moyen de m'en convaincre, c'est de célébrer; dès ce soir, mon mariage avec votre fille.

– Si promptement? impossible! songez à l'alarme qu'elle vient d'éprouver, à l'entreprise qui exige tous nos soins.

– Je n'écoute rien: Vous avez une chapelle au château; le docteur Hobbler se trouve au nombre de vos hôtes: donnez-moi cette preuve de votre bonne foi, mon coeur et mon bras sont à vous. Si vous me la refusez en ce moment, où votre intérêt doit vous porter à consentir à ma demande, comment puis-je espérer que vous me l'accorderez demain, quand j'aurai fait une seconde démarche qui ne me laissera nulle possibilité de revenir sur mes pas?

 

– Et notre amitié se trouvera-t-elle solidement renouée, si je consens à vous nommer mon gendre ce soir?

– Très certainement, et de la manière la plus inviolable.

– Hé bien, quoique votre demande soit prématurée, peu délicate, injuste à mon égard, donnez-moi la main, sir Frédéric, ma fille; sera votre épouse.

– Ce soir?

– Ce soir, avant que l'horloge ait sonné minuit.

– De son consentement, j'espère, s'écria Mareschal, car je vous previens, messieurs, que je ne resterais pas paisible spectateur d'une violence exercée contre les sentiments de mon aimable cousine.

– Maudit cerveau brûlé! pensa Ellieslaw. – Pour qui me prenez-vous, Mareschal? lui dit-il; croyez-vous que ma fille ait besoin de protection contre son père? que je veuille forcer ses inclinations? Soyez bien sûr qu'elle n'a aucune répugnance pour sir Frédéric.

– Ou plutôt pour être appelée lady Langley, dit Mareschal; bien des femmes pourraient penser de même. Excusez-moi; mais une affaire de cette nature, traitée et conclue si subitement, m'avait alarmé pour elle.

– La seule chose qui m'embarrasse, dit Ellieslaw, c'est le peu de temps qui nous reste, mais, si elle faisait trop d'objections, je me flatte que sir Frédéric lui accorderait…

– Pas une heure, monsieur Ellieslaw. Si je n'obtiens pas la main de votre fille ce soir, je pars, fût-ce à minuit. Voilà mon ultimatum.

– Hé bien, j'y consens, dit Ellieslaw; occupez-vous tous deux de nos dispositions militaires, et je vais préparer ma fille à un événement auquel elle ne s'attend pas. A ces mots, il sortit.

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